On a entendu beaucoup de choses sur la qualité de la saison de Marco Verratti, et notamment que c’était la pire de sa carrière et qu’il fallait se débarrasser du petit Italien au mercato. Pour essayer d’objectiver ou de contrecarrer ces discours alarmistes, on s’est plongé dans les stats de la saison 2022-2023 de Ligue 1 du numéro 6 parisien. Et comme il y a beaucoup de choses à dire, il y aura trois parties. La conclusion ? Marco reste égal à lui-même ! Avec ses bons et ses mauvais côtés…

Dans ce premier volet, on a mis ses stats en perspective avec celles de ses précédentes campagnes en Rouge et Bleu. Et, contrairement à toute attente, les datas ne confirment pas ce déclin annoncé. Les deux autres volets compareront les performances de Verratti à celles des autres milieux parisiens d’une part, et à celles des meilleurs milieux évoluant en Europe d’autre part.

Domaine de jeu	La saison 2022-2023 de Verratti
Efficacité offensive	Sa plus mauvaise saison
Présence offensive	Saison conforme à sa moyenne en carrière
Capacité à faire progresser le jeu	Une de ses meilleures saisons
Maîtrise technique	Une de ses meilleures saisons
Activité défensive	Une de ses plus mauvaises saisons

Efficacité offensive : sa plus mauvaise saison

Peut-on d’ailleurs réellement parler « d’efficacité » tant le petit Italien s’est montré maladroit face aux buts adverses.

Le constat est en tous les cas là, terrible : Verratti n’a marqué aucun but, ni donné la moindre passe décisive cette saison en Ligue 1. C’est à peine mieux en Ligue des Champions avec une maigre assist, pour Neymar à Haifa.

En 2021-2022, en marquant deux fois (lors du même match, face à Reims) il avait mis fin à, une série de 4 exercices sans but. On aurait donc pu espérer que le déclic avait opéré. Mais non… Son compteur reste bloqué à 7 buts en 10 saisons et 276 matches de Ligue 1 :

Il compte plus de saisons sans but (8) qu’avec au moins un but (3). Donc, ce n’est finalement plus une surprise de ne pas le voir scorer.

Pourtant, cette saison, il a eu pas mal d’occasions de débloquer son compteur. Le site understat.com comptabilise même, en cumulé sur la saison, 0.98 expected goal. Cela signifie qu’un joueur lambda, compte tenu des positions de tir qu’il a eues (et où il a effectivement tiré), aurait marqué un but en moyenne.

A Troyes (duel perdu face au gardien Gallon) et contre Marseille (frappe à l’angle des 6 mètres repoussé par Lopez, ci-dessous), il a notamment eu deux grosses occasions de conclure :

Si en plus de ne pas tenter sa chance quand il en a la possibilité, il rate les occasions où il ose enfin tirer, c’est sûr qu’il ne va pas marquer beaucoup…

Mais plus que son absence de buts, c’est le zéro pointé en passes décisives qui interpelle et tire vers le (très) bas le bilan de la saison de l’ancien de Pescara.

C’est en effet la première fois en onze saisons de Ligue 1 que cela lui arrive. Il tournait, avant cet exercice, à 3.8 passes décisives par saison et en avait toujours donné au moins deux.

Que s’est-il passé ? Verratti aurait-il perdu son sens de la passe et oublié de servir ses attaquants ?

Pas vraiment. Il est crédité de 2.9 expected assists. Cela signifie que si les attaquants n’avaient pas été maladroits, il aurait dû se voir récompensé de près de 3 passes décisives.

Ce total de 2.9 xA est même supérieur à 4 des 8 dernières saisons. saisons où il avait obtenu au moins 2 passes décisives.

A Troyes (video ci-dessous), notamment, il délivre un caviar à Vitinha qui s’y reprend à deux fois pour tromper le gardien adverse. C’est Verratti qui « fait » le but mais pas de passe décisive de comptabiliser car le goal a repoussé la première tentative de Vitinha.

Quoi qu’il en soit, avec 0 but et 0 passe décisive en Ligue 1, la saison 2022-2023 est forcément la plus mauvaise de la carrière du petit Hibou.

Présence offensive : saison conforme à sa moyenne en carrière

8 malheureux tirs en 2206 minutes, soit un tir tous les 3 matches… C’est l’horrible moyenne de tirs de Verratti cette saison en Ligue 1.

Le pire, c’est qu’il a déjà fait pire justement. Cette moyenne de 0.3 tirs par 90 minutes correspond exactement à sa moyenne en carrière !

Donc on ne peut pas dire que sa saison écoulée soit la plus mauvaise dans ce secteur de jeu. Il a d’ailleurs cadré la moitié de ses frappes, ce qui est supérieur à ses standards (37 %).

Le constat est le même pour les ballons touchés dans la surface adverse : le volume de l’Italien est famélique, mais dans la moyenne des ses précédentes saisons. Ni forcément pire, ni forcément mieux.

Il avait atteint un niveau intéressant de présence dans la zone de vérité en 2020-2021 mais a sérieusement reculé depuis.

Un indicateur un peu sophistiqué (fourni par le site understat.com) permet aussi de comparer dans le temps sa contribution aux offensives de son équipe. Il s’agit de l’expected goal Chain (xG Chain). Cette data mesure la contribution de chaque joueur ayant participé à une phase de possession aboutissant à un tir. Plus le xG Chain est élevé, plus le joueur est impliqué dans des offensives débouchant sur un tir de son équipe.

Sa moyenne de xG Chain de la saison est de 1 par 90 minutes. Il est donc impliqué dans des offensives devant générer un but par match en moyenne. Il s’agit de sa 2ème meilleure saison en carrière (sa moyenne est de 0.8) :

On a également la confirmation, qu’en terme de présence offensive, sa dernière saison n’est pas ridicule par rapport aux précédentes grâce à la stat des passes clés. Pour mémoire, il s’agit des passes débouchant sur un tir d’un coéquipier.

Sa moyenne 2022-2023 de 1.3 passes clés par 90 minutes est très proche de sa moyenne en carrière (1.4) :

Les 33 passes clés données en 2022-2023 portent d’ailleurs son total en carrière en Ligue 1 à 312, ce qui le situe au 3ème rang des joueurs parisiens sous QSI (c’est-à-dire depuis 2011), très loin derrière l’intouchable Di Maria (484) :

Au final, compte tenu de l’ensemble des stats offensives analysées (hors but et passes décisives), il s’agit donc une saison conforme à sa moyenne en carrière en terme de présence offensive.

Capacité à faire progresser le jeu : une de ses meilleures saisons

La saison dernière, Verratti a fait progresser, en moyenne, le ballon de 736 mètres par match. C’est beaucoup ? Oui. C’est son record depuis que la stat est disponible (2017-2018).

Que ce soit par la passe (511 mètres) ou la conduite de balle (226), le numéro 6 parisien a battu ses records en carrière en terme de progression vers le but adverse :

Avec des partenaires du milieu et de la défense (Ramos excepté) plus frileux que jamais pour jouer vers l’avant, Verratti a du se démener comme jamais pour amener le ballon dans les zones dangereuses.

Voilà qui vient encore un peu plus mettre à mal l’assertion selon laquelle, il avait perdu son mojo et disputait sa plus mauvaise saison en carrière…

Les autres stats de progression par la passe, sans être à leur sommet, ne sont pas non plus le reflet d’un joueur au bout du rouleau :

Que ce soit pour les passes réussies vers le dernier tiers ou les passes progressives (passe faisant gagner au moins 9 mètres), il est dans ses moyennes en carrière.

Bien sur, il n’a pas tout réussi. Mais sa prise d’initiatives, sa volonté de jouer vers l’avant et de faire progresser le jeu ont clairement fait un bien fou à un PSG sans idées ni fil directeur.

Son pourcentage de passes vers l’avant est d’ailleurs à son plus haut sur les quatre dernières saisons. Cela peut paraître anecdotique mais confirme un peu plus son souhait d’aller de l’avant. Pas vraiment le signe d’un joueur démotivé ou en roue libre.

Au global, Verratti a donc accompli sa meilleure saison dans sa capacité à faire avancer le jeu d’une équipe qui en avait d’ailleurs bien besoin.

Maîtrise technique : une de ses meilleures saisons

Véritable « cheat code » pour déjouer le pressing adverse pendant de longues saisons, Verratti a semblé moins à l’aise balle au pied cette saison. On a bien sûr tous en mémoire sa perte de balle fatale au Bayern en 1/8èmes de finales de Champions League.

Et plus globalement, on l’a vu perdre des ballons et rater des gestes techniques dans des situations où c’était impensable jusque-là.

Les stats reflètent-elles ce net recul en terme de gestion du cuir ? Pas vraiment. A une exception près, c’est même l’inverse.

A commencer par son nombre de ballons touchés, un assez bon révélateur de la capacité d’un joueur à dicter le tempo et à prendre ses responsabilités, qui est supérieur à sa moyenne en carrière (120 contre 119) :

A trois reprises cette saison en Ligue 1, il a dépassé les 140 ballons touchés au cours d’un match. Ses 155 touches à Auxerre fin mai entrent même dans le Top 6 des records pour un Parisien sous QSI en Ligue 1.

Avec autant de ballons joués et une certaine fébrilité apparente en différentes occasions, on pourrait s’attendre à ce que son nombre de ballons perdus ait fortement augmenté. C’est en fait l’exact opposé qui s’est produit.

Jamais en carrière, il n’a perdu aussi peu de ballons que la saison écoulée :

Bien sûr, il y a des pertes de balle qui coûtent plus que d’autres. Mais, dans la globalité, sa gestion du ballon a été encore plus sécurisée que par le passé.

Dernier indicateur, forcément limité car ne tenant pas compte de la difficulté des passes tentées mais que l’on partage quand même, le pourcentage de passes réussies.

Avec près de 93 % de passes réussies, l’Italien a réalisé sa 2ème saison avec le plus haut taux en carrière. Tout en jouant beaucoup vers l’avant.

Seul petit (gros ?) bémol, ses stats de dribbles. Pour le coup, là, on peut parler de « plus mauvaise saison de la carrière de Verratti ».

Alors qu’il restait sur sept saisons consécutives à l’incroyable pourcentage d’au moins 80 % de dribbles réussis, le magicien italien est retombé sur terre en 2022-2023 avec un palot 55 %.

Conséquence : 1.2 dribble réussi par match seulement, soit son plus bas niveau depuis sa première saison dans la capitale :

La stat de dribbles vient un peu refroidir l’ambiance de cette saison où, malgré les apparences, il a brillé comme jamais ou presque balle au pied. La balance penche néanmoins nettement du bon côté dans cette catégorie de la maîtrise technique.

Activité défensive : une de ses plus mauvaises saisons

Avec l’absence de passes décisives, c’est le domaine où Verratti a réellement failli en 2022-2023. Son manque d’impact défensif, assez visible à l’œil nu lors de plusieurs matches, se concrétise par des stats sans ballon plus faibles qu’à l’accoutumée.

Il n’a réalisé que 4.9 interventions défensives (tacles réussis, dégagements, interceptions, tirs contrés) par 90 minutes. Ce n’est pas son plus faible total en carrière mais positionne tout de même l’exercice 2022-2023 comme l’un des trois plus bas :

Il n’y a pas un type d’intervention où il est particulièrement en recul, mais c’est son activité générale qui est en baisse.

On a la confirmation de ses difficultés dans l’impact défensif avec la stat des duels. Il n’en a gagné « que » 6.9 par 90 minutes la saison dernière, soit son plus bas niveau en carrière :

Il est en-deçà de ses moyennes en carrière tant pour le nombre de duels gagnés (6.9 contre 8.1) que pour le taux de duels remportés (54 % contre 56 %).

A Nantes, début septembre, il a même passé plus d’une heure sur le terrain (avant de sortir) sans remporter le moindre duel (0/4).

Le bilan défensif n’est quand même pas totalement catastrophique. Par exemple, son nombre de ballons récupérés (7.1 par 90 minutes) est conforme à sa moyenne en carrière et est supérieure à sa saison précédente (5.9).

Son taux de tacles réussis est lui aussi tout à fait correct et même supérieur à sa moyenne en carrière (60 % contre 58 %) :

Alors que l’on aurait pu s’attendre à ce que ses stats défensives soient un peu gonflées, du fait d’un PSG bien moins serein qu’à l’accoutumée et plus souvent sur la défensive, c’est plutôt l’inverse qui s’est produit. Sa production défensive est à son plus bas en carrière ou presque.

Est-ce la cause ou la conséquence des difficultés du PSG sans le ballon ? Les chiffres ne le disent pas mais, en tous les cas, Verratti n’a pas eu son abattage défensif habituel.

Que n’a-t-on pas entendu, parfois au sein même de la communauté parisienne, sur la « médiocrité » de la saison de Marco Verratti. Figure emblématique du club, il a concentré beaucoup de critiques. Il faut dire que, comme d’autres leaders, il a failli lors des échéances importantes du club en Champions League.

Mais que nous apprennent réellement les stats de sa saison comparées à celles des saisons antérieures ?

Tout d’abord, que le petit Italien a effectivement été en difficulté dans les zones de vérité : en termes de buts et de passes décisives, son apport est en effet nul et, sans ballon, il a été bousculé comme rarement en carrière.

Mais, à l’inverse, il n’a peut-être jamais été aussi fort pour organiser le jeu, faire progresser le ballon et sécuriser le cuir.

Au final, toutes stats confondues, le bilan de la saison de l’Italien n’est certes pas flamboyant, mais loin d’être catastrophique non plus. Ce n’est pas sa meilleure saison, ni sa pire. Il est dans ses standards.

Le problème est qu’il a mis la barre tellement haute par le passé que les attentes sont toujours très élevées le concernant et que le moindre « coup de moins bien » prend des allures de fin de cycle.

Pourra-t-il rebondir dans le football plus organisé de Luis Enrique où sa maîtrise technique devrait exceller ?

Autant que la question de l’entraîneur, c’est celle des milieux qui l’entourent qui est cruciale. Compte tenu des qualités et des défauts de Verratti, il a besoin à la fois d’un joueur au fort impact athlétique capable de l’aider dans les missions défensives, mais aussi d’un milieu se projetant vers la surface adverse pour lui offrir du mouvement.

L’arrivée d’Ugarte devrait lui faire un bien fou. Si l’équipe retrouve une structure digne de ce nom et du mouvement pour l’accompagner, on pourrait alors retrouver un Verratti, à 31 ans, au sommet de son art…

Liens vers les autres volets du bilan de la saison 2022-2023 de Marco Verratti :

• Partie 2 : Verratti, toujours le meilleur milieu parisien
• Partie 3 : Verratti fait toujours partie du gratin des milieux jouant en Europe

Liens vers les autres articles bilan de la saison 2022-2023 :

• Unpopular opinion : Achraf Hakimi est le meilleur latéral parisien de la saison
• Ce que les 89 buts du PSG en Ligue 1 disent de son attaque
• Malgré un bon Donnarumma, le PSG a encaissé un nombre de buts record

Liens vers tous les articles du site concernant Verratti :

• Bilan des milieux de terrain pour la saison 2021-2022 : Verratti seul au monde
• Verratti, meilleur dribbleur d’Europe (2021-2022)
• PSG-Brest : Verratti cartonne (2021-2022)
• Bilan des milieux de terrain à mi-saison 2021-2022 : Verratti moyen mais au-dessus des autres quand même
• Bilan de la saison 2020-2021 de Verratti, l’intermittent du (grand) spectacle
• Metz-PSG (2020-2021) : un Verratti de gala
• Verratti-Paredes, une association complémentaire ? (2020-2021)
• Verratti, Gueye, Diallo : l’étonnant trio qui fait le plus avancer le ballon (2020-2021)
• Bilan de la saison 2019-2020 de Verratti
• Paredes-Verratti, analyse comparée de leur saison 2018-2019
• Bilan de la saison 2017-2018 de Verratti, génie incompris