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Analyses Saison 2022-2023

Hugo Ekitike est-il le prodige annoncé ?

Vous n’avez pas vu jouer Reims la saison dernière, ni les playoffs de relégation danois la saison précédente ? Vous vous fiez aux compilations de ses meilleures actions qui fleurissent sur YouTube depuis peu pour en savoir plus sur le niveau d’Hugo Ekitike ? Venez plutôt lire le véritable profil du nouvel attaquant du PSG vu des stats. Avec ses bons et ses moins bons côtés…

Les forces d’EkitikeLes faiblesses d’Ekitike
Son efficacité devant le butSon manque d’expérience
Sa capacité à (se) créer des occasionsDu déchet technique
Son goût pour le duel, notamment aérienPeu de tirs de loin et de têtes
Un investissement défensif limité

On commence par les aspects positifs du jeu d’Ekitike vu des stats :

1. Son efficacité devant le but

C’est probablement son atout numéro 1 et, à ce sujet, les compilations de ses meilleures actions ne mentent pas. On voit clairement que le gamin est lucide et habile face au but.

Les chiffres confirment cette aptitude. Pour sa 1ère vraie saison dans l’élite, il a marqué 10 buts en 1275 minutes. Un ratio de 0.7 but toutes les 90 minutes qui le situe certes derrière Mbappé mais devant les autres attaquants du PSG, ainsi que la plupart des attaquants de Ligue 1 :

D’autres datas confirment cet extraordinaire réalisme face au but. Il marque en effet un but tous les 3 tirs. C’est bien ? Oui, c’est même la meilleure moyenne de tous les joueurs de Ligue 1. Personne ne fait donc mieux au PSG, même pas Kylian Mbappé !

Son efficacité face au but se mesure aussi avec son ratio entre les expected goals et les buts inscrits : avec 10 buts pour 8.2 expected goals, il a fait mieux que ce que prévoit le modèle compte tenu de ses positions de tirs. Au PSG la saison écoulée, il n’y a que Mbappé et Neymar qui sont dans ce cas de figure.

Comment expliquer cet incroyable réalisme ? En premier lieu par sa « sélection de tirs » : Ekitike, avec Reims, ne tirait quasiment pas de loin (seulement 5 tirs sur toute la saison) et privilégie les bonnes situations de tir. Il n’est donc pas du genre à frapper à tout prix mais va chercher à se mettre en bonne position de tir pour armer.

On le voit à travers l’indicateur des xG/tir qui mesure la probabilité qu’un tir se transforme en but selon l’endroit d’où il est pris. L’ancien Rémois a un ratio de 27 %, qui est même supérieur à celui d’Icardi dont on connait pourtant la capacité à préférer les tirs de près :

Son réalisme s’explique aussi par sa faculté à cadrer ses tirs :

Là encore, il fait mieux que la totalité des attaquants du PSG. Mais tout est lié : en tirant de près et en sélectionnant les positions les plus propices pour tirer, il maximise ses chances de cadrer.

2. Sa capacité à (se) créer des occasions

Dans une équipe de Reims qui peinait à se montrer dangereuse (10.4 tirs/match, 17ème de L1), Ekitike parvenait malgré tout à se créer de nombreuses situations.

On en veut pour preuve son ratio d’expected goals par 90 minutes (0.6) qui le positionne devant Neymar et Messi malgré un collectif beaucoup plus limité côté rémois.

Ses 2.2 tirs par 90 minutes ne sont pas extraordinaires, mais remis dans le contexte de Reims, cela constitue une belle moyenne.

Le constat est le même pour ses passes décisives : il en a donné 3 en Ligue 1 en 2021-2022. Cela peut sembler peu mais le rapport de scouting du site fbref.com indique que cela le situe quand même parmi les 20 % des attaquants les plus efficaces dans ce secteur.

L’analyse est identique pour les actions amenant un tir : avec 2.7 par 90 minutes, il est loin des moyennes de Messi et Neymar (6), voire de Mbappé (5.1). Mais là encore, fbref le positionne dans le 1er quart des attaquants des cinq principaux championnats européens.

Il est également l’auteur de 4.4 chevauchées avec ballon toutes les 90 minutes, ce qui le positionne parmi les meilleurs attaquants européens pour cet indicateur.

3. Son goût pour le duel, notamment aérien

Souvent positionné seul en pointe dans l’équipe d’Oscar Garcia, Ekitike n’avait d’autre choix que d’aller au charbon et de jouer une multitude de duels.

On en a la confirmation avec ses stats :

Il disputait en moyenne la saison dernière 14 duels toutes les 90 minutes. Parmi les joueurs offensifs du PSG, il n’y a que Neymar qui est au-dessus !

Son taux de réussite n’est en outre pas mauvais puisque légèrement supérieur à celui de Mbappé (49 % contre 48 %).

Parmi ces duels, il y a une part non négligeable de duels aériens (4.2). Aucun joueur de l’effectif parisien n’en disputait autant, mais le jeu direct rémois est bien évidemment responsable de ce chiffre élevé avec une volonté de trouver le grand (1.90 m) attaquant rémois par de longs ballons.

Il a remporté la saison dernière 44 % des duels aériens disputés, ce qui n’est pas mauvais (Icardi était à 36 %). Il pourra constituer une solution si le PSG se décide à jouer long.

Passons maintenant aux limites du jeu d’Ekitike, telles que l’on peut les déceler à travers les stats.

1. Son manque d’expérience et ses blessures

Cela peut paraître injuste de lui reprocher cela mais Ekitike est effectivement un tout jeune joueur de 20 ans sans expérience. Il n’a joué que 26 matches de Ligue 1 (15 comme titulaire) et ne compte que 1361 minutes de temps de jeu.

La saison écoulée, il a en outre été freiné par une blessure à l’ischio qui l’a écarté des terrains pendant 2 mois (mars et avril) et l’a privé de 10 rencontres.

Il s’est de nouveau blessé cet été aux ischios avec l’équipe de France des moins de 20 ans lors du tournoi Maurice Revello (ex tournoi de Toulon). On espère que son corps le laissera en paix cette saison et que, avec le temps, il se développe musculairement pour éviter ce type de pépin physique.

Autre mauvais point, sûrement lié à son manque d’expérience : il a été expulsé deux fois la saison dernière : une 1ère fois à Lens pour une faute brutale dans la surface, plus par maladresse que par volonté de faire mal :

https://youtube.com/clip/UgkxrlgzPLDsJOMnDsHSHWSmahWTwL8IlsUO

Sa seconde expulsion est plus embêtante puisqu’il s’agit d’un coup de tête asséné à un adversaire, en coupe de France (à Thaon), quelques minutes après son entrée en jeu :

https://youtube.com/clip/Ugkxcb4_ke0RACWMzWhP3xgOKbwjodHwhuRQ

Un manque de nerfs, et peut-être de maturité, qui ne passera pas au PSG…

2. Du déchet technique

Bien sûr, sur les compils vidéos de ses meilleures actions, on le voit enchaîner les actions d’éclat avec une aisance technique folle pour son gabarit. Et le propos ici n’est pas de dire qu’il a les pieds carrés. Mais la réalité est moins belle que ce que les actions d’éclat laissent à penser.

Malgré tout son talent, le jeune attaquant a beaucoup de déchet technique. On en veut pour preuve plusieurs datas, à commencer par celle des ballons perdus :

Il perd en moyenne 35 % des ballons qu’il joue. C’est un ratio nettement supérieur à celui de Neymar (28 %). Le contexte rémois où il doit souvent se débrouiller seul face à plusieurs défenseurs est forcément en partie responsable de ce taux. Mais celui-ci reste très élevé.

Son déchet provient notamment de ses passes ratées. Son taux de passes réussies (71.1 %) est très nettement inférieur à celui des attaquants actuels du PSG, qui sont certes tous des virtuoses techniques (ou presque).

Il y a fort à parier que son taux remonte en jouant avec des joueurs eux-mêmes plus doués techniquement et surtout plus proches de lui sur le terrain qu’à Reims mais il part néanmoins d’assez bas et devra être plus fin dans ses transmissions s’il veut voir le ballon revenir…Sa capacité à s’associer avec ses partenaires sera primordiale s’il veut avoir du temps de jeu au PSG.

Enfin, même si le dribble est plutôt considéré comme étant un de ses points forts (il en réussit 2.2 par 90 minutes, ce qui le positionne parmi l’élite à son poste en Europe), il y a là aussi beaucoup de déchet. Il rate même un peu plus d’un dribble sur deux, ce qui le positionnerait au PSG au niveau du Neymar de la saison dernière (46 %).

Sous QSI, le pourcentage moyen de dribbles réussis des attaquants est de 55%, donc on attend une progression de sa part dans ce secteur.

3. Peu de tirs de loin et de têtes

Ses deux buts de loin (celui contre Nice ci-dessous) tournent en boucle dans les compilations de ses meilleures actions.

Pourtant, ses frappes de loin sont plutôt l’exception que la règle. Il a en effet marqué deux fois en ne tirant que 5 fois de l’extérieur de la surface.

On peut voir le verre à moitié plein et louer son efficacité. Ou à moitié vide et se dire que ce n’est pas le jeune Rémois qui va contribuer à régler un problème récurrent du jeu parisien.

Ses tirs de loin ne représentent que 16 % de ses frappes, ce qui est même inférieur au taux de Mbappé (27 %).

Le constat est encore plus sévère pour les têtes : Ekitike n’a en effet effectué qu’un seul tir de la tête sur l’ensemble de la saison 2021-2022 de Ligue 1 ! De l’avis même de ses plus fervents défenseurs, il s’agit d’un point faible de son jeu.

Reims réussissait 4.2 centres par match en moyenne (contre 3.1 au PSG) mais ce ne fut pas suffisant pour que leur attaquant brille dans le domaine aérien.

4. Un investissement défensif limité

Compte tenu du faible taux de possession rémois (42%, dernier de Ligue 1) et de l’écart avec celui du PSG (63 %, 1er), on s’attendait à ce que les stats défensives d’Ekitike soient assez nettement supérieures à celles des attaquants parisiens. Son équipe ayant moins souvent le ballon, il est en effet amené à réaliser plus d’actions défensives.

Alors oui, le site fbref nous indique qu’en terme d’interceptions, de tirs contrés ou de dégagements, il se situe parmi les avant-centre des grands championnats européens qui réalisent le plus d’actes défensifs.

Mais rien d’extraordinaire si l’on ajuste ses moyennes au taux de possession de son équipe.

En outre, sur certains indicateurs, il est même en retrait par rapport aux attaquants parisiens, pas réputés pour leur acharnement à défendre.

On en a l’exemple avec les tacles : il en réalise 1.8 toutes les 90 minutes. C’est moins que Neymar ou Di Maria !

Même les stats de pressing, en apparence favorables, ne sont pas aussi flatteuses que ça pour le jeune Rémois. Certes, il réalise 18 actions de pressing par 90 minutes, ce qui le situe au-dessus de tous les attaquants et même sur le podium de tout l’effectif du PSG.

Mais en ajustant à la possession les données de pressing d’Ekitike et des attaquants du PSG, c’est-à-dire en gommant le fait que Reims a moins souvent le ballon que le PSG et donc plus enclin à réaliser du pressing, le tableau est sensiblement modifié.

En données ajustées à la possession, Ekitike effectue moins de pressing que Di Maria, Neymar et Icardi.

On remarque en outre avec le graphique ci-dessus que son taux de succès dans ses tentatives de pressing est assez faible (seul Messi en a un moins bon que lui).

Au global, même si l’on se réjouit de voir le PSG recruter parmi les pépites de Ligue 1 et que l’on souhaite évidemment qu’il explose totalement au contact de Mbappé & Co, les stats nous invitent à tempérer l’immense « hype Ekitike » qui semble avoir gagné les suiveurs parisiens depuis l’annonce de sa signature.

Le joueur a des qualités certaines, notamment face au but (mais sans garantie que cette réussite maximale face au but perdure), et présente un combo vitesse-technique qui fait saliver ; mais il a aussi pas mal de lacunes et son jeu est loin d’être totalement abouti.

Ce qui nous interpelle également, c’est le rôle qu’il aura dans l’attaque parisienne pour la saison à venir. Partant du principe que Galtier veut jouer à deux pointes avec Mbappé et « un attaquant qui soit un point de référence dans la surface », Ekitike apparaît plutôt comme le remplaçant de Mbappé. Il n’a aujourd’hui pas les qualités d’un attaquant servant de point de fixation et joueant en pivot. En revanche, son profil présente pas mal de similitudes avec celui de Mbappé : vitesse, dribbles, finition.

Comme Mbappé, il privilégie d’ailleurs le côté gauche pour déclencher ses actions, comme le montre sa heatmap ci-dessous :

Mais si Ekitike devient le remplaçant de Mbappé, il risque de ne pas joué beaucoup de minutes tant le numéro 7 parisien passe de temps sur le terrain. A l’inverse, leur zone d’influence et leurs caractéristiques semblent tellement proches que leur complémentarité ne saute pas aux yeux.

Alors, quel rôle pour le jeune Hugo cette saison ? Acceptera-t-il d’être une simple doublure de Mbappé dans une année marquée par la coupe du monde fin 2022, pour se faire les dents avant de prendre la relève dans deux saisons ? Profitera-t-il des blessures récurrentes des autres éléments offensifs pour gagner une place de titulaire ?

On est en tous les cas impatients de le voir à l’œuvre et de le voir faire exploser ses stats !

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