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Mbappé capitaine du PSG : pourquoi ce n’est pas une bonne idée

Cela fait quelques matches désormais que Kylian Mbappé porte, en l’absence de Marquinhos, le brassard de capitaine du PSG. Cette nouveauté est saluée par les fans du PSG et est même soutenue par de nombreux journalistes experts du club. Pourtant, selon moi, il s’agit d’un non-sens. Je vous explique pourquoi dans ce billet d’humeur.

Avant d’entrer dans le détail de mon argumentaire, je tiens à rappeler, par prudence, qu’évidemment je considère Mbappé comme un joueur extraordinaire en passe de devenir le meilleur joueur de l’histoire du club (ça méritera d’ailleurs un petit article stats, bien sûr…). Ce que je vais dire sur son capitanat ne retire en rien l’immense respect que j’ai pour le joueur et ses qualités de footballeur.

En revanche, lui confier le brassard de capitaine, me paraît être un non-sens pour quatre raisons :

  1. Mbappé symbolise l’individualisme poussé à l’extrême et non pas la défense des intérêts du collectif
  2. Le comportement de Mbappé sur un terrain est loin d’être exemplaire
  3. Mbappé n’a pas démontré, autrement que par ses buts, qu’il pouvait être un leader d’équipe
  4. En confiant le brassard à une des stars de l’équipe, on renforce encore la position des joueurs au-dessus de celle du club

Mbappé symbolise l’individualisme poussé à l’extrême et non pas la défense des intérêts du collectif

Pour moi, Mbappé est l’archétype du footballeur moderne, entièrement voué à la défense de ses intérêts individuels et peu soucieux de l’intérêt général.

Toute la carrière du prodige français témoigne de cet état de fait. Programmé pour réussir, toutes les décisions prises dans sa carrière ont été dictées par la recherche de son propre intérêt : son départ de Bondy pour Monaco, son bras-de-fer avec les dirigeants monégasques pour jouer davantage, son transfert au PSG et son extraordinaire prolongation de la fin de saison dernière.

Ce qui guide le clan Mbappé, c’est bien la défense des intérêts de Kylian. « Me first », pourrait être sa devise. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela lui réussit.

Il mène une carrière extraordinaire, en particulier en sélection, et décroche tous les records les uns après les autres. Et même quand il prend une position (courageuse) contre la politique de sa fédération en matière de sponsors, on ne peut s’empêcher d’y voir (peut-être à tort) une recherche son propre intérêt (et de ses propres marques) plutôt qu’une volonté de mener un combat collectif.

Est-il une exception dans le football moderne à se comporter ainsi ? Evidemment non. Cela a toujours plus ou moins existé mais on voit bien que la tendance s’est accentuée ces dernières années. On en veut pour preuve le choix de plus en plus fréquent des joueurs d’aller au bout de leur contrat pour faire tourner le rapport de forces à leur avantage et toucher au passage des primes à la signature de plus en plus folles.

Autre exemple (qu’on est bien placée pour mettre en avant) : la place de plus en plus importante prise par les stats, avec le reverse de la médaille que l’on connaît, à savoir la tentation de plus en plus forte de briller soi-même, parfois au détriment de ses coéquipiers.

Bon, d’accord mais quel rapport avec le brassard ?

Pour moi, dans une vision sûrement assez romantique voire passéiste, le capitaine, porte-parole des joueurs, est là pour défendre les valeurs du collectif. Il s’exprime au nom des joueurs et doit donc faire preuve d’empathie, être capable de se mettre à la place de chacun. Tout le contraire de ce que représente, pour moi, Mbappé.

Loin de moi l’idée de considérer que Mbappé n’est pas intelligent ou trop individualiste sur le terrain. Mais il a toujours été amené à penser à lui d’abord avant de penser aux autres et cela me semble incompatible avec la fonction de capitaine qui doit raisonner en termes collectifs et solidaires.

Pour dire les choses encore plus crûment, comment peut-il être amené à défendre les intérêts de ses coéquipiers alors même qu’avec son salaire pharaonique, il plombe les finances du club et donc, par ricochet, le recrutement d’autres grands joueurs, voire mêmes les progressions de salaires de ses coéquipiers actuels.

Oui, évidemment, le salaire actuel de Mbappé, conjugué au fair-play financier, est un frein au recrutement de grands joueurs. Le raccourci peut sembler simpliste, mais on a bien là la preuve que Kylian raisonne de manière individualiste avant de penser collectif. Il savait très bien en acceptant la proposition indécente de Nasser que cela constituerait un frein dans la perspective de recruter des joueurs à forte valeur.

Le comportement de Mbappé sur un terrain est loin d’être exemplaire

Toujours avec notre vision un peu romantique du capitaine, celui-ci doit être exemplaire sur le terrain. Le brassard est en quelque sorte une récompense (ce n’est pas que ça bien sûr) des efforts fournis sur le terrain par un joueur en particulier.

En confiant le brassard à quelqu’un, un entraîneur valorise l’attitude, le professionnalisme, le goût de l’effort d’un joueur en particulier.

Et sans être méchant, Mbappé est encore une fois aux antipodes de tout cela. Oui, il est excellent balle aux pieds et a porté le PSG sur ses épaules une grande partie des deux dernières saisons. Mais son attitude pose quand même question.

A la manière d’un Messi, en fin de carrière après 7 ballons d’or et un titre officieux de « meilleur joueur de l’histoire », Mbappé rechigne à faire les efforts défensifs que le football moderne réclame de la part des attaquants. Et avoir un attaquant qui ne défend pas est, en 2023, pénalisant lorsque l’on a des ambitions collectives, mais alors en compter deux dans ses rangs…

En ne défendant pas davantage, Mbappé non seulement plombe son équipe et les espoirs de titre européen qui vont avec, mais marque une rupture avec ses coéquipiers. Combien de temps ces derniers vont-ils accepter de courir pour deux ?

Le deal « OK, je cours pour toi, mais toi tu nous qualifies en faisant la différence devant » est déjà une insulte à l’esprit d’équipe mais est en partie entendable compte tenu du talent hors normes du joueur ; mais il devient caduque à partir du moment où les résultats en Champions League ne sont pas au rendez-vous, ou quand les écarts de salaires deviennent à ce point abyssaux.

En agissant ainsi, Mbappé joue en plus contre ses propres intérêts : en étant aussi déconnecté de ses coéquipiers, il étire le bloc parisien et rend encore plus compliqué le fait de le trouver facilement une fois le ballon récupéré. Et, en outre, s’il se mettait un peu plus en mouvement en phase défensive, il récupèrerait davantage de ballons qui constitueraient autant de cartouches supplémentaires pour marquer.

Bref, son attitude, comme celle de Messi, n’a rien de celle d’un capitaine, censé se dépouiller sur le terrain et entraîner ainsi ses coéquipiers derrière lui. A-t-on déjà vu Mbappé se vider les tripes sur le terrain ? Non.

Et que l’on ne me dise pas que c’est pour être plus lucide face aux gardiens. Les efforts défensifs produits par les attaquants de Liverpool, City ou du Bayern, ne les empêchent pas vraiment d’être efficaces offensivement…

A-t-on déjà vu un capitaine arrêter sa course en pleine contre-attaque parce que pas servi par son coéquipier (cf. Mbappé contre Strasbourg en début de saison) ? Non, évidemment.

Un capitaine doit-il se battre pour tirer un pénalty aux détriments de son coéquipier, meilleur tireur que lui ? Evidemment non…

Un capitaine peut-il tirer une tronche de plusieurs kilomètres quand il sort à la 85ème minute ? Evidemment, non…

Mbappé n’a pas démontré, autrement que par ses buts, qu’il pouvait être un leader d’équipe

Bien sûr que Mbappé a tout pour être un leader et rendre ainsi plus légitime son capitanat. Il a ce talent pour débloquer des situations à lui seul et, ainsi, entraîner toute son équipe dans son sillage.

Il l’a déjà démontré en équipe de France (rien de moins qu’en finale de Coupe du Monde) ou même avec le PSG. D’ailleurs, ses coéquipiers en attendent tellement de lui que, parfois, cela semble les tétaniser un peu et réduire leurs propres initiatives.

Mais être un leader, ce ne sont pas que des actes et des buts. Il y a aussi les mots, l’attitude, le « body language ». Et, jusqu’à preuve du contraire, Mbappé n’a pas été ce leader-là.

Un leader encourage ses coéquipiers en difficulté, engueule celui qui ne respecte pas les consignes, stimule, communique, agit. Pas vraiment l’image que l’on a d’un Mbappé, ultra focus sur sa propre partition.

On a bien en tête quelques exemples de prise de parole sur le terrain, mais davantage en mode « critique du boulot mal fait » par ses coéquipiers (ou ses dirigeants…) que réellement comme capitaine rassembleur.

Son attitude lors du récent Brest-PSG où il avait le brassard n’est pas faite pour rassurer. Il ne m’a pas semblé plus communiquer avec ses coéquipiers. Je l’ai même trouvé plus nerveux que d’habitude, comme en témoigne sa double faute de la fin de match qui a tant fait parler et aurait pu lui valoir un carton rouge.

Bien sûr, ce point n’est pas immuable. Avec le brassard justement, Mbappé se sentira peut-être de plus en plus impliqué dans le projet collectif et davantage légitime et à l’aise pour être plus vocal. Mais pour le moment, on a du mal à voir en lui le leader qui entraînera ses coéquipiers derrière lui.

En confiant le brassard à une des stars de l’équipe, on renforce encore la position des joueurs au-dessus de celle du club

On comprend bien l’idée de confier le brassard à Mbappé : il est le porte-drapeau du projet parisien, le futur meilleur joueur du monde, donc c’est lui que l’on met en lumière, par tous les moyens possibles.

Mais en agissant ainsi, le club scie une nouvelle fois la branche sur laquelle il est assis. L’un des problèmes du PSG actuel, lié notamment à sa croissance ultra rapide de ces 10 dernières années, est qu’il n’est pas assez fort en tant qu’institution. Cela a été dit et répété : les joueurs actuels (certains d’entre eux en tous les cas) sont plus grands que le club (qui reste jeune).

Cela pose évidemment des tas de problèmes au quotidien pour faire aller le projet dans la bonne direction. Mais c’est à mon avis inhérent à l’arrivée des Qataris et à la raison même de leur venue à Paris.

Ce « soft power » qui les guide les pousse à recruter des stars plus que des joueurs inscrits dans un projet sportif et les empêche de les recadrer lorsque leurs intérêts s’opposent à ceux du club. C’est la quadrature du cercle.

Et en confiant le brassard à Mbappé, le PSG ne fait que renforcer ce phénomène. Le joueur est déjà au-dessus du club et a même probablement imposé, consciemment ou pas, le choix du directeur sportif. En lui confiant le brassard, il renforce encore cette place d’un Mbappé au-dessus de l’institution.

Il y a bien sûr des arguments militant pour le brassard de Mbappé. Il me fera d’ailleurs peut-être mentir en se comportant en leader vocal et exemplaire. Il sera sûrement également plus écouté du corps arbitral que ne peut l’être un Marquinhos bien trop lisse. Mais, à ce jour, et à rebours de tout ce qu’on a entendu ces dernières semaines sur le sujet, cela ne me semble pas être une bonne idée. Voilà, c’est dit !

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