Si le manque de jeu long et de frappes de loin (étudié dans la partie 2 de cette Preview PSG) constituent des faiblesses « historiques » du jeu parisien et ne datent pas de la saison écoulée, loin de là, on ne peut pas en dire autant de ce troisième et dernier axe d’amélioration mis en avant dans cette série d’articles, à savoir le manque de réalisme offensif.
Au contraire, ces dernières saisons, et de manière bien cohérente tant le PSG a investi dans ce secteur, les attaquants parisiens avaient eu tendance à surperformer par rapport au modèle des expected goals.
Mais alors que le PSG restait sur (au moins) cinq exercices avec un écart positif entre le nombre de buts réellement marqués et les expected goals, le phénomène inverse a été constaté pour 2019-2020. De peu certes (1 but d’écart) mais la différence avec les deux saisons précédentes notamment (différentiel de 19 puis de 13 buts) est important.
Le PSG est d’ailleurs la seule équipe du podium de Ligue 1 à être dans ce cas de figure puisque Marseille (+ 3 buts) et Rennes (+ 5 buts) ont été plus performants offensivement que le modèle prévisionnel.
Nous allons tenter d’expliquer dans cet article pourquoi le PSG a connu cette inversion la saison passée et, par conséquent, essayer d’en déduire des pistes d’amélioration pour la saison à venir.
Un nombre d’expected goals record
La première explication vient du nombre et du type de tirs pris. Jamais dans son histoire récente (et probablement dans son histoire tout court), le PSG n’avait autant tiré au but : 16.6 fois par match.
C’est près de deux tirs de plus que la saison précédente et même plus de trois tirs de plus que le deuxième de Ligue 1 dans cet exercice (Monaco, 13.5).
Ces tentatives ont en outre un « coefficient de dangerosité » beaucoup plus fort que les saisons précédentes. En effet, le ratio Expected Goal/tir s’élève à 0.17 (ce qui signifie qu’en moyenne un tir du PSG avait 17 % de chances de se transformer en but) alors qu’il se situait entre 0.14 et 0.16 les saisons antérieures. Pour info, la moyenne des autres équipes de Ligue 1 la saison passée est de 0.10.
Le graphique ci-dessous représente, pour les six dernières saisons, les tirs en ordonnée et les buts attendus par tir en abscisse.
La saison 2019-2020 est tout en haut à droite du graphe. En clair, cela signifie que cette dernière version du PSG a non seulement tenté plus souvent sa chance mais également que ces tirs ont été pris dans des positions plus avantageuses que lors des saisons précédentes.
Conclusion : le nombre d’expected goals du PSG en 2019-2020 explose tous les compteurs : 2.82 buts attendus par match, c’est la plus forte moyenne historique du PSG.
La hausse par rapport à 2018-2019 est impressionnante (+0.4 xG par match) mais c’est peut-être et surtout l’écart avec les autres équipes de Ligue 1 qui permet de mesurer encore mieux la portée de la performance parisienne.
Le PSG devance son dauphin dans cette statistique, Monaco, de plus d’un but attendu par rencontre !
Et forcément, plus la cible est élevée, plus l’objectif est difficile à atteindre. Avec un nombre de buts attendus aussi fort, le PSG risquait de ne pas, pour une fois, réussir à dépasser le modèle. Et c’est donc ce qui s’est passé.
Petite parenthèse : ce nombre élevé d’expected goals n’est-il pas contradictoire avec l’affirmation de la première partie du Preview d’un jeu offensif moins huilé. Réponse : pas vraiment. Le nombre de passes clés rapporté au nombre de tirs est en effet le plus bas de ces cinq dernières années (74 % contre une moyenne de 76 % les quatre saisons précédentes). La proportion de tirs issus d’une passe d’un coéquipier est donc en baisse. Cela vient donc confirmer que, certes le PSG s’est créé beaucoup d’occasions, mais cela ne vient pas concrétiser un jeu collectif plus fluide, mais plutôt des initiatives personnelles.
Des faillites individuelles
La seconde explication de ce manque de réalisme offensif global est à rechercher du côté des défaillances individuelles.
Le graphique ci-dessous retrace l’écart entre les buts attendus et les buts réellement marqués par les « attaquants » du PSG la saison écoulée.
Deux phénomènes sautent aux yeux :
- Aucun joueur offensif du PSG n’a réellement surperformé la saison passée devant le but adverse
- Edinson Cavani est l’attaquant qui a le plus gâché d’opportunités de marquer
En 2018-2019 par exemple, chaque offensif du PSG avait en moyenne inscrit 2 ou 3 buts de plus que le modèle prévisionnel, venant ainsi justifier les investissements financiers conséquents consacrés aux stars de l’attaque. On ne retrouve pas un tel phénomène la saison dernière où quatre des huit attaquants seulement ont fait mieux qu’attendu. Et dans de très faibles proportions : la surperformance la plus notable étant celle de Neymar avec 13 buts inscrits contre 12.2 attendus, soit un réalisme offensif de +0.7.
Difficile d’expliquer cette performance globale moyenne des attaquants. Peut-être que le nombre de matches inférieur aux autres saisons a joué et que sur une saison entière ils auraient d’avantage fait mentir le modèle.
Le paradoxe Cavani
Edinson Cavani a quant à lui bien contredit le modèle des expected goals, mais pas dans le sens attendu : il a inscrit seulement 4 buts contre 9.8 Expected Goals, soit un écart négatif colossal de 5.8 buts. Peut-être que la fin de saison lui aurait permis de réduire ce différentiel mais son manque d’efficacité offensive sur les 14 matches joués est considérable.
Les supporters parisiens ont probablement en tête quelques boulettes mémorables du chouchou du Parc : loupés incroyables face à Gurtner dont un pour tuer le match à Amiens, face à face perdu contre Costil (Bordeaux) et un mémorable raté face à Rünarsson (Dijon) alors que les cages étaient vides devant lui.
La question que l’on se pose alors est la suivante : cet écart par rapport aux expected goals constitue-t-il un accident cette saison ou l’Uruguayen est-il coutumier du fait ? Les statistiques du site understat.com nous ont permis de remonter jusqu’en 2014-2015, sa seconde saison dans la capitale. Le constat est défavorable au Matador puisqu’au global, sur ces six exercices-là, Cavani s’est montré moins réaliste que le modèle des expected goals ne le prévoyait : 122 buts marqués en Ligue 1 contre 128 buts attendus. Autrement dit, il a marqué six buts de moins que la moyenne des joueurs dans les positions de frappes où il s’est retrouvé.
C’est tout le paradoxe de ce joueur hors normes : meilleur buteur de l’histoire de du club et incroyable machine à se procurer des occasions, mais capable également de maladresses surprenantes dans le dernier geste.
Faut-il recruter en attaque ?
Le PSG doit-il dès lors recruter pour compenser le départ de son buteur historique ? La réponse nous paraît être négative pour plusieurs raisons, la principale étant que le PSG dispose déjà dans son effectif d’un buteur d’exception en la personne de Mauro Icardi. Sur la même période que celle analysée ci-dessus pour Cavani, l’Argentin a au contraire de son ex-coéquipier, marqué plus qu’attendu : 114 contre 104.
Avant sa (mauvaise) dernière saison intériste, Icardi restait sur quatre exercices d’exception avec un écart de 14 buts de plus que le modèle.
Débarrassé de Cavani, il devrait donner encore davantage la pleine mesure de son talent, aperçu surtout en début de saison passée. Le voir plus souvent associé avec les virtuoses de l’attaque que sont Mbappé, Di Maria et Neymar permettrait en outre de peaufiner des automatismes dont on a dit en première partie de ce Preview qu’ils avaient pâti de l’absence régulière d’association (seulement cinq matches disputés tous les quatre).
Le PSG dispose en outre d’autres solutions à la pointe de l’attaque, Mbappé, voire Neymar ou le jeune Arnaud Kalimuendo (18 ans, 5 fois buteur lors de la coupe du Monde des -17 ans en 2019) qui devrait faire ses premiers pas en Ligue 1 cette saison.
Les ressources offensives ne manquent donc pas et le PSG devrait, dans ce mercato contraint, concentrer ses efforts financiers sur les postes de latéraux et de milieux de terrain (cf. les parties 1 et 2 du Preview). Il y a fort à parier que, même sans recrue offensive, et surtout si le PSG se décide à tirer un peu plus de loin, l’écart entre les buts et les expected goals retrouvera ses standards habituels.
Conclusion
En synthèse, dans cette série d’articles consacrés au PSG, nous avons essayé de mettre en avant ce que le PSG devait améliorer pour la saison à venir par rapport à l’exercice 2019-2020. Le tableau ci-dessous résume ces lacunes et les moyens éventuels d’y faire face.
Points à améliorer | Propositions d’action correctrice |
1. Un jeu collectif perfectible : – Un manque d’automatismes en raison d’un turnover incessant – Une forte dépendance aux exploits individuels de Neymar | Trouver dès que possible un « onze type » et le roder au moins lors des matches importants de Ligue 1 Renforcer l’importance de Di Maria dans la construction des attaques et/ou recruter un latéral droit performant dans le dernier tiers |
2. Des points faibles récurrents : jeu long et frappes de loin | Insérer Paredes dans l’équipe type et/ou recruter un milieu polyvalent capable de tirer de loin et de renversements de jeu rapides |
3. Un manque de réalisme offensif inédit | Installer durablement Icardi au poste d’avant-centre |
Article paru sur cotestats.fr en août 2020 dans le cadre d’une Preview de tous les clubs de Ligue 1 pour la saison 2020-2021