Après avoir vu dans une première partie de l’étude consacrée à la défense centrale que Thomas Tuchel avait essayé de nombreuses combinaisons différentes la saison passée, nous allons maintenant regarder de plus près les performances individuelles des défenseurs centraux, à commencer par la récente paire victorieuse de la Copa America, Marquinhos-Thiago Silva.
Nous l’avons vu dans la première partie de l’étude, Marquinhos (25 ans) a réalisé d’excellentes prestations en défense centrale la saison écoulée, se mettant, enfin, au niveau de son modèle Thiago Silva. Ce n’est pas la seule nouveauté de la saison puisque, faute de recrutement dans ce secteur, son entraîneur a décidé de l’aligner au milieu de terrain (12 fois sur les 37 matches disputés en Ligue 1 et Ligue des Champions).
La meilleure saison de la carrière de Marquinhos
Après des débuts hésitants (à Liverpool notamment, en l’absence de Verratti), il va livrer une saison de haut niveau à un poste qu’il découvrait pourtant. Une saison complète donc que l’on peut qualifier de point culminant (jusqu’à maintenant bien sûr) dans la carrière de l’ancien joueur des Corinthians.
L’évaluation de 7.24 produite par le site spécialisé Whoscored traduit bien l’impression visuelle ressentie en voyant jouer le Brésilien cette saison puisque cela constitue sa meilleure évaluation en carrière. C’est même très nettement mieux que les rating de ses années précédentes sous les couleurs parisiennes (toujours autours de 7).
Regardons dans le détail cette évaluation, en fonction des compétitions et des postes où il a joué : selon l’algorithme de Whoscored, Marquinhos a rendu de meilleures copies en Ligue 1 (7.24) qu’en ligue des champions (6.79). Ses statistiques offensives et défensives sont meilleures en championnat de France que lors des joutes continentales. Néanmoins, il est l’auteur, lors des trois victoires en Ligue des Champions auxquelles il a participé (Liverpool, Belgrade et MU), de trois masterclass avec trois grosses évaluations à la clé (respectivement 7.26, 7.87 et 7.11). On retiendra notamment son but et ses 105 ballons joués à Belgrade, sa réussite optimale aux tacles contre les Reds (3/3) ou encore son jeu long contre Manchester United (5/7).
Aussi bon au milieu qu’en défense
Et de manière plus générale, comment s’est comporté Marquinhos au milieu de terrain tout au long de la saison ? Plus que bien selon Whoscored qui lui attribue la note de 7.29 sur les 7 rencontres qu’il a disputés dans l’entrejeu en Ligue 1, contre 7.22 en défense (en 23 matches). Au milieu, Marqui touche finalement presque autant de ballons qu’en défense (82 vs 87) et gâche toujours aussi peu (88.3 % de réussite aux passes vs 92.8 %). Mais, surtout, il fait parler son agressivité, tant recherchée par Tuchel puisqu’il y double son nombre de tacles réussis (3.7 par match vs 1.7 en défense).
Dans quels domaines, l’ancien Romain s’est particulièrement distingué cette année pour être crédité de sa meilleure évaluation ? Plusieurs statistiques peuvent être mises en avant. En premier lieu, même s’il s’agit d’un joueur à vocation défensive, on ne peut s’empêcher de retenir ses buts : alors qu’il sortait de sa seule saison parisienne sans but, il en a inscrit 3 en Ligue 1 (contre Amiens à l’aller et au retour, et à Dijon) et un autre en Ligue des Champions (à Belgrade). Puisque seul Kehrer parmi les défenseurs centraux a également scoré, Marquinhos aura marqué 80 % des buts des défenseurs centraux cette saison ! On en profitera pour signaler sa redoutable précision face au but puisque ses trois buts sont ses seuls tirs cadrés de la saison.
Autre stat offensive témoignant de son impact sur le jeu : son nombre de passes clés. Jamais dans sa carrière, il n’en avait délivré autant, aidé, il est vrai, par son positionnement au milieu de terrain.
12 passes clés sur l’ensemble de la saison (dont 3 en Champions League), c’est le double de la saison précédente. C’est également plus que tout autre défenseur central parisien la saison écoulée (2ème Kehrer avec 7).
L’écart avec ses collègues défenseurs centraux est également important dans un autre indicateur : le jeu long. Alors que ses coéquipiers sont parfois frileux à utiliser cette arme pourtant indispensable pour déstabiliser les blocs adverses, Marquinhos, lui, n’hésite pas à « allonger » pour chercher la profondeur ou un coéquipier démarqué. Et son positionnement au milieu de terrain n’a presque pas diminué son appétit pour cet exercice (de 4.2 à 3.9 par match). Il a en revanche un peu réduit sa précision (de 66 % à 59 %), déjà en baisse par rapport à la saison précédente (de 69.5 % à 64.1 %) et inférieure à celle de ses coéquipiers. Le paradoxe étant que c’est celui qui en tente le moins (Kehrer) qui a le meilleur taux de réussite et celui qui est le moins timide dans cet exercice qui a le moins de succès (Marquinhos).
Marquinhos a donc réussi la meilleure saison de sa carrière et grâce doit en être rendue à Thomas Tuchel d’avoir créé ce monstre à deux têtes, mi-milieu de terrain, mi-défenseur central. 2018-2019 fut-elle un « one shoot » et le Brésilien va-t-il retrouver exclusivement sa place en défense cette saison comme cela a été annoncé, ou bien le duo complémentaire avec Verratti sera-t-il reformé pour les grands événements ? Compte tenu de ce qu’il a montré la saison écoulée, on mettrait bien une pièce, malgré le recrutement d’Idrissa Gueye, sur la seconde option…
Thiago Silva, l’indispensable
Si pour Marquinhos la saison 2018-2019 fut l’année de la réelle éclosion de son immense talent et de la définitive levée de doute que le PSG détenait bien un joueur de classe mondiale, ce ne fut simplement qu’une saison de plus au plus haut niveau mondial pour son compatriote Thiago Silva (
334 ans).
En effet, les saison passent (il vient de conclure son septennat dans la capitale) et l’ancien Milanais règne toujours sur la défense parisienne. Peut-être même plus que jamais. En tous les cas, les chiffres ci-dessous montrent à quel point ses absences sont préjudiciables aux résultats de l’équipe.
Sur les deux dernières saisons, l’écart de points inscrits (2.5 vs 2) et de buts encaissés (0.8 vs 1.2) selon la présence ou nom du capitaine parisien est trop important pour être un simple fruit du hasard. La saison écoulée, il a manqué, pour blessure principalement, 15 rencontres qui se sont soldées par 3 nuls et 3 défaites. On a notamment en mémoire les catastrophes défensives de la fin de saison et les 16 buts encaissés en 8 matches de championnat (pour 4 défaites) à partir de sa sortie sur blessure à la 16ème minute du match à Lille. Sans compter la défaite en finale de coupe de France.
L’année passée, il a également manqué le match aller à Naples où la défense avait pris l’eau (2-2). En 2017-2018, il était absent lors de deux (à Strasbourg et contre Rennes) des trois uniques défaites en championnat et avait été curieusement « benché » pour le match aller du 1/8ème de finale au Bernabeu (défaite 3-1).
Monsieur Propre
Mais qu’est-ce qui rend le capitaine brésilien si précieux à son équipe ? Beaucoup de choses, dont certaines ne sont pas lisibles dans les stats. Ce que nous disent les chiffres en revanche, c’est tout d’abord que Thiago Silva défend beaucoup mais proprement. Au contraire de ses compères de la défense (3.4 tacles de moyenne), il tacle très peu : 0.9 tacle en moyenne toutes les 90 minutes.
Cela a toujours été une constante dans sa carrière, mais particulièrement cette année, il avait décidé de ne tacler qu’en cas de grand danger. La stat est un peu folle : lors de 15 matches sur 25 cette saison en Ligue 1, il n’a pas taclé une seule fois ! Il affiche ainsi sa plus basse moyenne en carrière.
En revanche, on peut compter sur lui pour dégager des centres tendus ou des corners dangereux. Avec 4 dégagements de moyenne, il est le défenseur central parisien le plus efficace dans ce domaine, et de loin.
Il a même réalisé un match à 10 dégagements à Bordeaux début décembre ! Et un seul match sans dégagement (et pour cause, c’est à Lille où il est sorti rapidement sur blessure).
Son jeu long est rarement mis en avant, mais, malgré une baisse par rapport à la saison précédente, il reste un des parisiens qui l’utilise le plus (le 3ème derrière Paredes et Marquinhos), et avec une très bonne réussite (73 %).
Enfin, et c’est un corollaire logique de son aversion aux tacles, Thiago Silva commet peu de fautes. Ses stats en carrière dans ce domaine sont même impressionnantes, même si légèrement en hausse depuis deux saisons. Des quatre défenseurs centraux du PSG, il est celui qui est le moins sanctionné par les arbitres.
Alors, Thiago Silva, à bientôt 35 ans, est-il encore le meilleur défenseur central parisien ? Et, si oui, est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle ? La question sous-jacente étant : est-ce avec Thiago Silva comme leader de défense et capitaine que ce PSG ira chercher la Ligue des Champions ? La majorité des stats présentées semble nous dire que oui et que ses absences ont été très coûteuses.
Ce serait trop rapidement oublier que, comme beaucoup d’autres, il a évidemment failli par le passé et est loin d’être exempt de tout reproche lors des récentes claques mémorables (à Barcelone en mars 2017, contre MU un an plus tard) lors de l’épreuve reine. Une certaine rumeur a même circulé cet été indiquant que Leonardo cherchait à s’en séparer. Pendant ce temps-là, Thiago Silva, répondait sur le terrain en conduisant, avec Marquinhos en défense centrale, la Seleção au titre sud-américain. Alors, en fin de contrat en juin 2020, avec une armée de jeunes et talentueux défenseurs centraux aux dents longues à ses côtés, est-ce la saison ou jamais pour O Monstro avant de partir en beauté ?
Article paru sur Culture PSG en août 2019