Rennes-PSG (1-1) : Le PSG roi du carton rouge en Europe
L’expulsion de Kimpembe à Rennes dimanche (match nul 1-1) vient donc s’ajouter à la longue liste des Parisiens exclus cette saison. L’occasion de voir dans quelle mesure le PSG bat des records en la matière, et surtout de s’interroger sur les causes de cette inflation.
Presnel Kimpembe s’est-il sacrifié pour éviter que le jeune Rennais Jeremy Doku ne file seul vers le but à quelques minutes du coup de sifflet final ? Ou bien était-il simplement en retard sur son intervention, fatigué par ses semaines de forçat et fort de ses 3 762 minutes jouées cette saison (équipe de France incluse) ? En tous les cas, M. Buquet lui a tendu le onzième carton rouge de la saison pour un Parisien : 7 en Ligue 1 et 4 en Champions League.
Presko réussit ainsi la « performance » d’avoir à la fois été expulsé en championnat et en coupe d’Europe. Pour le reste, ces onze expulsions se répartissent entre sept joueurs de la manière suivante :
Pour mémoire, dans le détail, cela donne :
- Expulsions de Diallo face à Metz suite à deux cartons jaunes et à Monaco en tant que « dernier défenseur »
- Neymar : échauffourée contre Marseille et geste d’humeur contre Lille
- Kurzawa et Paredes : participation à l’échauffourée contre Marseille
- Kimpembe : deux cartons jaunes contre Leipzig et tacle non maîtrisé à Rennes
- Gueye : 2 cartons jaunes à Leipzig et action dangereuse à City
- Di Maria : geste d’énervement sur Fernandinho à City
Personne ne fait pire en Europe
Si en Ligue 1, deux équipes (Lyon et Marseille) comptent encore plus d’expulsés que le PSG, c’est le champion de France en titre qui détient le triste privilège d’être l’équipe d’Europe (ou au moins des cinq principaux championnats) la plus expulsée cette saison toutes compétitions confondues !
Le graphique ci-dessus décrit, parmi les grands championnats européens et les deux coupes européennes, le nombre d’expulsés par équipe. Paris devance ainsi Lyon et Marseille.
On peut faire deux autres constats à la lecture de ces données : on trouve 11 clubs français parmi les 23 premiers (et ce ne sont pas vraiment les parcours européens des clubs français, hormis le PSG, qui expliquent cette stat…) ; et parmi les cadors européens, il n’y a que la Juventus (6 expulsés) qui accompagne le PSG. Mais quand on connaît la saison du champion d’Italie en titre (éliminé précocement en Champions League et seulement 5ème à ce jour en Série A), ceci explique peut-être cela.
Pas de lien entre le nombre de fautes commises et le nombre d’expulsés
Ce constat nous a incité à nous pencher sur les cartons reçus par les ténors des grands championnats pour voir à quel point le PSG se distinguait.
Si l’on s’en tient aux cartons reçus en championnat, Paris est largement au-dessus des équipes de notre échantillon en termes d’expulsions puisqu’aucune autre n’a plus de 3 expulsés dans son championnat. On notera au passage que l’Atletico réussit la performance de ne compter aucun expulsé en Liga (et 1 seul en Champions League) malgré un nombre de cartons jaunes très important (92, soit 2.6 par match) et un style de jeu qui appelle les fautes.
Autre constat : le nombre important de cartons jaunes reçus par le PSG par rapport à ses homologues européens : 71, soit le plus haut total de notre panel derrière l’Atletico. En revanche, lorsque l’on se penche sur les données relatives aux fautes commises, le PSG n’est plus le mauvais élève de la classe avec 12.3 fautes/match (pour une moyenne de notre échantillon à 12.1).
Cette distinction entre le nombre de cartons reçus et le nombre de fautes commises confirme que les expulsions ne viennent pas sanctionner une succession de fautes mais sont plutôt récoltés pour des actes d’énervement ou des fautes grossières. D’ailleurs on ne trouve aucun parisien parmi les 59 joueurs de Ligue 1 au nombre de fautes commises (Gueye est 60ème avec 35 fautes) alors qu’ils sont deux dans le Top 10 des joueurs les plus expulsés (Diallo et Neymar).
10 expulsés en Ligue 1 en 2012-2013, record à battre
Pour terminer cette analyse comparative, nous nous sommes penchés sur la relation historique qu’entretient le PSG avec les cartons rouges.
Depuis la prise en main par le Qatar, le PSG récolte en moyenne en championnat 62 cartons jaunes et 4 rouges par exercice (source : whoscored.com). La saison en cours est nettement au-dessus mais ne battra probablement pas le record des 10 expulsions de la saison 2012-2013 (Ancelotti aux manettes). Pour les nostalgiques, souvenons-nous des prestigieux noms des 10 « coupables » : Beckham, Matuidi, Lavezzi, Sakho, Verratti, Le Crom, Sirigu, Thiago Motta, Thiago Silva et Ibrahimovic. Comme quoi, les problèmes de comportement ne datent pas d’aujourd’hui.
Concernant les cartons jaunes, Paris peut battre son record de l’ère moderne (79 en 2011-2012) si plus de huit joueurs sont avertis lors des deux derniers matches de Ligue 1.
Alors, comment expliquer l’inflation constatée cette saison ?
Des arbitres plus susceptibles en Ligue 1 ?
Plusieurs éléments peuvent être avancés. Sans faire le procès de l’arbitrage, c’est un facteur qui doit entrer en ligne de compte. Alors, le PSG, est-il victime d’un arbitrage défavorable ? Même si on a eu parfois du mal à comprendre la logique de ses décisions, M. Buquet dimanche soir n’a pas réellement commis d’erreur en expulsant Kimpembe. Et même s’il en est à son quatrième parisien expulsé dans sa carrière (en 35 matches où il a arbitré le PSG), difficile de voir en lui un arbitre « anti PSG ». D’ailleurs, sur les onze expulsions de cette saison, seule peut-être celle de Diallo face à Metz est réellement discutable. En tous les cas, l’intervention très médiatisée de Leonardo à l’encontre de M. Brisart à la fin du match contre Lens n’aura pas eu l’effet escompté…
On peut néanmoins faire le constat que les arbitres de Ligue 1 ont quand même la gâchette facile : 0.14 carton rouge y sont distribués par rencontre, contre 0.08 en moyenne dans les quatre grands championnats européens (source : fbref.com). Et ce alors même qu’ils ne sifflent pas plus de fautes que dans les autres ligues, ni ne distribuent plus de cartons jaunes !
Il ne faut sûrement pas généraliser à partir d’une seule saison mais force est de constater que les arbitres de Ligue 1, à nombre de fautes commises quasiment équivalentes, brandissent plus de cartons rouges que leurs confrères européens. Communication, pédagogie, tout ça tout ça…
Cette équipe ne sait pas perdre
La principale explication des cartons parisiens ne réside pas là. D’ailleurs, proportionnellement, le PSG a été plus sanctionné en Champions League (4 expulsés en 12 matches, soit 0.3 par match) qu’en Ligue 1 (7 en 36 matches soit 0.2 par match). C’est évidemment plutôt du côté du contrôle des émotions que le PSG doit chercher les raisons de ces expulsions. Et ce n’est pas forcément nouveau. Par le passé, le comportement de Verratti, Alves ou déjà Neymar avaient provoqué des expulsions sans commettre pour autant de grosses fautes.
Le lien est malheureusement évident entre le score d’une rencontre et les cartons parisiens. Et ce n’est pas, comme on pourrait s’y attendre, l’infériorité numérique qui provoque un retard au score, mais plutôt l’inverse. En effet, quand les Parisiens sentent que le match leur échappe, ils ont alors tendance à perdre leurs nerfs, à sortir de leur partie et, par la même occasion à commettre des fautes grossières ou des actes d’antijeu qui les font regagner le vestiaire prématurément.
Cette saison ce fut flagrant à plusieurs reprises : à Leipzig, contre Marseille, contre Lille, à City et encore à Rennes ce week-end. Cette équipe, tellement habituée à gagner tout le temps en championnat, ne sait pas perdre. Elle n’en a pas l’habitude et panique lorsque la défaite se profile. Ce fut déjà le cas par le passé en Champions League (Verratti contre le Real, Neymar de la touche contre Man United…) et c’est particulièrement évident cette saison puisque le cours des matches s’avère être contraire beaucoup plus fréquemment qu’à l’accoutumée en Ligue 1.
Sans faire de la psychologie de comptoir, c’est en quelque sorte un comportement d’enfant gâté à qui on a cassé son jouet. Ces « stars », tellement « câlinés » ou « bichonnés » par le club et son environnement tout au long de l’année, ne savent pas réagir autrement que par des « caprices » quand les événements ne se déroulent pas comme prévu. Et « l’enfant roi » Neymar n’est pas le seul concerné.
9 des 11 des cartons rouges reçus le furent ainsi lors de défaites puisque seuls Diallo face à Metz et Kimpembe dimanche (pour ce qui ressemble quand même étrangement à une défaite) échappent à la règle. Une stat relevée par Opta vient confirmer cette incapacité des Parisiens à se contrôler lorsque le match leur échappe : 7 des 11 cartons rouges reçus cette saison le furent après la 80ème minute.
Plus le couperet s’approche, moins les Parisiens semblent capables de bien gérer leurs émotions.
Où sont les cadres ?
Enfin, comment ne pas mettre en avant le manque de tauliers dans cette équipe ? Quand l’équipe perd le fil de ses matches, personne ne semble en mesure de recadrer les choses et d’empêcher que cela « parte en vrille ». Le capitaine Marquinhos a certainement beaucoup de qualités mais pas celles, apparemment, de remettre les idées en place de ses coéquipiers quand la situation échappe à l’équipe.
Difficile cependant de rejeter la faute sur le défenseur brésilien. Surtout quand cinq des onze expulsions de la saison concernent des vice-capitaines (Neymar, Kimpembe et Paredes). Si même les cadres dérapent, difficile pour Marquinhos de tout gérer. Mais c’est un terrible aveu d’échec de constater que ceux qui sont censés tenir la boutique sont les premiers à partir à la faute.
Pour le dire vite, cette équipe manque de joueurs d’expérience, capables de prendre entre quatre yeux Neymar ou Mbappé quand ils s’écartent de la ligne, de parler diplomatiquement aux arbitres avant qu’ils ne sortent les cartons et de savoir user du vice sans se faire prendre par la patrouille. Un profil à la Thiago Motta en quelque sorte, qui sera néanmoins compliqué d’aller chercher lors du prochain mercato. Et ce n’est pas la rumeur Sergio Ramos et ses 15 cartons rouges et 142 jaunes en carrière qui nous fera penser le contraire…
Article paru sur Culture PSG en mai 2021