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Analyses Saison 2022-2023

Kylian Mbappé a-t-il progressé depuis son arrivée au PSG ?

La rupture de confiance entre le PSG et Kylian Mbappé, non convoqué pour le stage de présaison 2023-2024 au Japon, nous ont conduit, à l’occasion de l’analyse de sa campagne 2022-2023, à regarder en détail l’évolution de ses performances depuis son arrivée au PSG en 2017. Avec une question en tête : les stats du numéro 7 parisien permettent elles de mettre en évidence une progression de son niveau de jeu entre ses premières saisons en Rouge et Bleu et sa probable fin de parcours à Paris ? La réponse est globalement négative. Explications.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est nécessaire de rappeler que l’on a parfaitement conscience qu’il est assez réducteur de comparer les stats, aussi complètes et variées soient elles, d’une saison à l’autre pour évaluer si un joueur a progressé ou pas. Beaucoup d’autres éléments entrent en ligne de compte, et forcément, en premier lieu, la qualité et le style de jeu de l’équipe où le joueur évolue. Et les stats ne disent pas tout du niveau de performance d’un joueur.

Mais, n’empêche, après une nouvelle sortie médiatique du « génie Français » où il a déclaré, en substance, que lui avait fait le job en 2022-2023 et que si l’équipe stagnait ce n’était pas de sa faute (comprendre : celle des dirigeants et des autres joueurs), on a voulu regarder en détails les stats de Kylian Mbappé pour voir leur évolution depuis son arrivée au PSG. Et les motifs de satisfaction ne sont guère nombreux…

En analysant l’ensemble des datas à disposition sur la période 2017-2023, on ne recense que quatre secteurs dans lesquels Mbappé affiche une progression depuis son arrivée à Paris.

On va donc dès à présent les présenter pour ensuite détailler tous les secteurs où les stats mettent en évidence une stagnation ou une diminution du niveau de performance de Mbappé en Ligue 1.

Un premier constat, important compte tenu de la fragilité des autres joueurs majeurs de l’équipe : Mbappé est rarement blessé et rate donc peu de matches.

Lors des trois dernières saisons, il n’a manqué en cumulé que 14 rencontres de Ligue 1 et n’a pas connu de grosse blessure.

Hors coronavirus début 2020-2021, il n’a jamais manqué plus de deux matches de Ligue 1 d’affilée.

Pas de chance néanmoins, ses rares blessures l’ont fait manquer ou l’ont handicapé lors des principales échéances européennes du club de ces trois dernières saisons (avant le Final 8 à Lisbonne en 2020, en demi-finale contre City en 2021 et avant le 1/8ème contre le Bayern cette saison)

Second point positif relevé : la participation au jeu. Cet aspect de son jeu est parfois critiqué car cela l’incite à revenir toucher des ballons au milieu de terrain, mais sa qualité de passe et sa vision du jeu lui permettent souvent de débloquer des situations.

Plusieurs stats relatives à la passe traduisent cette progression, comme les passes réussies vers le dernier tiers et les passes progressives (passe d’au moins 9 mètres en direction du but adverse) :

Pour les passes réussies vers le dernier tiers du terrain, il est passé de 1.5 lors de ses trois premières saisons dans la capitale à 2.6 la saison dernière. Pour les passes progressives, il vient également de battre son record cette saison.

Troisième domaine où l’on enregistre une amélioration dans le jeu de Mbappé selon les stats : la maîtrise technique. Plusieurs datas le confirment et notamment son taux de ballons perdus.

Alors qu’il perdait environ 30 % des ballons qu’il jouait lors de ses quatre premières saisons en Rouge et Bleu, ce taux est tombé à 27 % en 2021-2022 puis 25 % la saison écoulée.

Pourtant, cette saison, ses dribbles ratés (cf. infra) ont engendré beaucoup de pertes de balle. Cela signifie que par ailleurs (passes, contrôles…), le déchet a été moins important.

On en a d’ailleurs la confirmation avec le taux de passes réussies. Cela ne présage pas de la difficulté des passes tentées mais reste un indicateur intéressant :

Il a réussi près de 83 % de ses passes, ce qui ne lui était plus arrivé depuis 4 saisons.

Ses données de centres confirment également son aisance technique. Après quatre premières saisons sous les 30 % de réussite, dont deux sous les 20 %, il vient d’aligner deux exercices à au moins 30 % de centres réussis :

Enfin, dernier aspect du jeu de Mbappé que les stats permettent de considérer comme en progression : la variété de ses frappes.

Il a certes toujours cette préférence pour le côté gauche de la surface, mais on notera qu’il tente plus sa chance de loin qu’au début de sa carrière. Les tirs de l’extérieur de la surface ne représentaient qu’entre 12 et 15 % de ses tentatives entre 2017 et 2021, contre environ 25 % ces deux dernières saisons :

Il a d’ailleurs marqué trois buts de loin lors chacune des trois dernières saisons, contre seulement un par saison au début de sa carrière parisienne.

Voilà donc pour les domaines où Mbappé présente des stats en progression depuis son arrivée dans la capitale.

A l’inverse, dans de nombreux domaines, on ne perçoit pas de progression dans les chiffres produits.

Comme écrit en introduction, cela ne signifie qu’il n’a pas progressé de manière intrinsèque, mais que la production sur le terrain ne se traduit pas par des stats en hausse.

Dans certains cas, il partait de toutes façons de tellement haut qu’il est difficile de faire mieux.

C’est notamment le cas dans la première stat que l’on regarde pour les attaquants, à savoir l’efficacité face au but.

Sa saison la plus prolifique en termes de buts inscrits (33) est la saison 2018-2019, soit sa seconde au PSG. Le constat est identique quand on rapporte son nombre de buts à son temps de jeu :

Après une première saison d’adaptation (27 buts, soit 0.6 but par 90 minutes), il a ensuite aligné trois campagnes de Ligue 1 à au moins 1 but toutes les 90 minutes en moyenne.

Depuis deux saisons, en revanche, il est redescendu sous cette barre symbolique, tout en continuant, bien sûr, à marquer beaucoup (28 puis 29 buts).

Cette baisse de productivité s’explique, pour la saison écoulée, par un moindre réalisme face au but adverse.

Hormis lors de sa première saison au PSG, il a toujours eu un différentiel positif entre ses buts et ses expected goals, ce qui signifie qu’il a plus marqué qu’attendu compte tenu des positions de tirs qu’il a eues.

Cependant, la saison dernière cet écart s’est réduit à 1.2, soit le plus petit différentiel de ses cinq dernières saisons en Ligue 1 :

Le bilan reste donc largement positif mais on note une petite chute de réalisme la saison dernière.

L’analyse de son taux de tirs cadrés met en outre en évidence une petite baisse ces deux dernières saisons, en particulier en 2021-2022 où il était redescendu sous les 50 % :

Cette légère baisse de performance est néanmoins à être en parallèle avec la hausse récente du poids des tirs de loin dans son total de tirs. Qui dit plus de tirs lointains, dit, de manière assez mécanique, moins de chances de cadrer.

Outre le réalisme offensif, légèrement déclinant, c’est son manque d’altruisme qui ressort de ses stats de la saison écoulée.

On le mesure tout d’abord, basiquement, avec ses passes décisives. Ses 6 passes décisives de 2022-2023 représentent un ratio de 0.2 passes par 90 minutes, soit son plus faible taux depuis son arrivée au PSG :

Il avait certes fixé la barre très très haut la saison précédente (17 assists), mais sa moyenne 2022-2023 est aussi inférieure à ses quatre premières saisons au PSG, y compris sa toute première saison.

Il peut certes reprocher à ses coéquipiers de ne pas avoir su convertir plusieurs de ses caviars (il est d’ailleurs crédité de 9.2 expected assists donc il aurait mérité d’avoir plus de passes décisives).

Mais, plus largement, cette baisse des passes décisives est aussi la conséquence d’une diminution de ses passes clés, c’est-à-dire les passes débouchant sur un tir d’un coéquipier.

Sa moyenne de 1.8 passes clés en 2022-2023 est la plus basse de son séjour à Paris, après la saison 2020-2021 :

Autre secteur où l’on est impatient de voir le Français progresser : le jeu de tête. Alors qu’il avait marqué 3 buts de la tête avec Monaco l’année du titre, il est plutôt sur un rythme d’un but de la tête par saison depuis qu’il a signé au PSG (seule exception : 2 buts en 2020-2021) :

Dans une équipe qui compte des latéraux de classe mondiale comme Hakimi et Mendes, il est frustrant de ne pas voir l’avant-centre et meilleur buteur de l’histoire du club être davantage en mesure de représenter un danger dans le jeu aérien.

A l’image de son nombre de buts de la tête, son nombre de tirs de la tête reste extrêmement bas. Sa meilleure saison en la matière étant sa première saison :

La plus grosse chute de performance de Mbappé la saison dernière concerne les dribbles. Alors qu’il s’agissait sans contestation d’un point fort pendant ces cinq premières saison à Paris, le champion du monde 2018 a été en délicatesse avec son dribble la saison dernière.

Il n’a en effet réussi que 37 % de ses tentatives de dribbles, contre plus de 50 % lors de chacune de ses cinq premières saisons dans la capitale :

Par conséquent, sa moyenne de dribbles réussis est également au plus bas (2.4 contre 3.2 en moyenne jusque-là). On constate aussi que, malgré une réussite en berne, le Français a continué à beaucoup tenter de passer en un contre un. Sa moyenne de dribbles tentés (6.4) est en effet l’une de ses plus hautes en carrière.

Le manque de fluidité dans le jeu parisien n’a certes pas spécialement permis de mettre Mbappé dans des situations favorables, mais la chute du taux de réussite est très impressionnante. Il faut aussi probablement y voir une volonté de sa part de faire des différences individuelles, de forcer les choses en solo, faute de jeu collectif digne de ce nom en 2022-2023.

Peu efficace dans le dribble, il a par conséquent provoqué peu de fautes la saison dernière. En tous les cas, son nombre de fautes subies est son plus bas en carrière :

On a la traduction de son coup de moins bien aux dribbles et de la baisse de son nombre de fautes provoquées dans la stat de duels.

Il n’a en effet remporté en 2022-2023 que 4.2 duels par 90 minutes, soit son plus bas niveau en carrière. Son taux de duels gagnés est lui aussi à son plus bas (42 % contre une moyenne à 47 % jusque là) :

Enfin, comment ne pas aborder les aspects défensifs lorsque l’on pointe du doigt les axes de progression possibles de Mbappé ?

Son nombre de ballons récupérés en 2022-2023 est à son plus bas depuis que la stat est disponible (2019-2020) :

Sa moyenne de tacles réussis, sans jamais avoir atteint de sommet, était elle aussi plus haute lors de ses premières saisons au PSG :

Pour compléter cette analyse du jeu sans ballon, on aurait d’ailleurs aimé avoir accès aux stats de courses de Mbappé. Mais les données de kilomètres parcourus et de sprints à haute intensité en Ligue 1 ne sont pas accessibles au grand public.

En revanche, l’UEFA met à disposition les stats de distance parcourue et les données ne sont guère flatteuses pour KM qui voit ses km (vous l’avez ?) baisser saison après saison.

L’écart de distance parcourue par match entre sa saison à Monaco (10 kms) et sa dernière campagne (8.5) est assez hallucinant…

Les appels dans la profondeur constituent un autre domaine où il semble avoir diminué sa production (pas de stat disponible). Compte tenu de ses qualités de vitesse et sa science du démarquage, on aurait aimé le voir davantage attaquer la profondeur. Pas toujours simple en Ligue 1, certes, mais l’impression visuelle d’un joueur qui préfère revenir au milieu toucher le ballon plutôt qu’attaquer l’espace est assez terrible.

En conclusion, l’analyse de la saison de Kylian Mbappé par le prisme de stats est assez paradoxale. Alors qu’il a continué, comme les saisons précédentes, à être la principale force de frappe offensive et à se montrer très régulièrement décisif (et c’est bien ce qu’on demande à un attaquant), on constate que globalement, il a réalisé une de ses plus mauvaises saisons en Ligue 1. Pour ne pas dire sa plus mauvaise saison dans certains domaines du jeu.

En regardant l’ensemble de son parcours sous le maillot parisien, probablement en fin de cycle compte tenu des événements récents (non-convocation pour le stage d’avant-saison au Japon), on trouve peu de secteurs du jeu où il affiche des stats en progression entre son arrivée en 2017 et 2023.

Plusieurs raisons à cela selon nous :

  • il a mis la barre tellement haut dans certains secteurs qu’il est compliqué de progresser
  • le néant absolu en terme de fonds de jeu du PSG ces deux dernières saisons ne lui a pas permis d’exprimer au mieux ses immenses qualités
  • un manque de volonté de sa part de travailler ses points faibles (jeu de tête, défense) pour mieux se reposer sur ses qualités
  • une certaine lassitude mentale du joueur, avec peut-être un sentiment, conscient ou pas, de fin de cycle au PSG

En tous les cas, on est impatients de le voir faire remonter certaines stats (dribbles, efforts défensifs). Au PSG avec Luis Enrique. Ou plus vraisemblablement ailleurs. A moins qu’en 2023-2024, sanctionné par le PSG, ce soit surtout sa stat de matches regardés depuis son canapé qui explose !

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