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Analyses Saison 2020-2021

Thilo Kehrer, volontaire mais trop limité

Nous terminons cette série d’articles sur les performances individuelles des défenseurs centraux du PSG en 2020-2021 avec Thilo Kehrer. L’Allemand est l’une des têtes de Turc préférées des supporters parisiens. Il faut dire que sa saison ne respire pas la sérénité et qu’il a plus souvent inquiété que rassuré. La confirmation en chiffres et en graphiques.

On a aimé

Le temps de jeu retrouvé en Ligue 1

Avec 24 matches (pour 16 titularisations) et 1 610 minutes, Thilo Kehrer a disposé du 8ème temps de jeu du PSG en Ligue 1. Ça avait pourtant mal commencé puisque, blessé à deux reprises, il n’avait disputé que 4 des 12 premières journées de championnat (pour 240 minutes).

Mais sur le dernier tiers de la saison, globalement débarrassé de ses pépins physiques, il a joué 9 des 13 derniers matches, dont 6 comme titulaire. Au final, il aura disputé 47 % du temps de jeu possible en Ligue 1. Pas de quoi pavoiser certes, mais c’est beaucoup mieux que la saison dernière et qu’une grosse partie de l’effectif.

1 610 minutes d’accord, mais à quels postes et pour quelles performances ?

En ne retenant que les matches de Ligue 1 où il aura joué au moins 45 minutes, c’est clairement au poste de défenseur central qu’il a le plus été utilisé par Tuchel et Pochettino :

L’année dernière, sur le peu de minutes jouées, il avait plutôt été utilisé comme latéral. Mais que ce soit cette saison ou plus encore en 2018-2019, il a assez nettement été positionné comme défenseur central en priorité : 74 % des minutes depuis son arrivée et 32 matches sur 44.

Avec son algorithme basé sur les stats, le site Whoscored le crédite d’une moyenne de 6.91 en tant que défenseur central et de 7.04 comme latéral (pour les trois saisons disputées, en ne retenant que les matches avec au moins 45 minutes). L’écart n’est pas suffisant pour en tirer de conclusion.

Cette saison, après des débuts plus que calamiteux (catastrophique à St Etienne pour les premiers pas de Pochettino notamment), il a semblé retrouver un peu de sérénité en fin d’exercice. Il est même bon à Dijon fin février ou à Strasbourg en avril.

C’est évidemment trop peu pour un joueur acheté aussi cher (37 M€), mais au moins le ballon ne lui brule plus les pieds et il a retrouvé un peu de confiance.

En Ligue des Champions, il a certes disputé cinq matches, mais aucun comme titulaire et, surtout, il n’a disputé qu’une seule petite minute après les poules (à Barcelone).   

Son état d’esprit

Pas facile de trouver des éléments positifs dans la saison de Thilo Kehrer. Pourtant, en cherchant bien, on peut mettre en avant son état d’esprit. Sa volonté de bien faire. C’est en tous les cas l’impression qu’il dégage. Plusieurs stats viennent conforter cette théorie.

La plus étonnante a trait à son efficacité au pressing. Cela n’avait pas particulièrement sauté aux yeux lors de la diffusion des matches, et pourtant l’Allemand est le joueur parisien le plus efficace au pressing de la saison en Ligue 1 :

Avec 37 % d’actions de pressing réussies, il devance Kurzawa et Bakker. Drôle de trio…

La stat, issue du site www.fbref.com, peut prêter à sourire mais les chiffres sont têtus. Il a réussi, en Ligue 1, 74 des 202 tentatives de pression réalisées. Sur l’ensemble de la saison, ils ne sont que 5 Parisiens à avoir réussi plus de pressing que lui. Le premier est Gueye avec 129, mais avec un moins bon taux que Kehrer (33 %).

L’Allemand a 6 matches à son actif en Ligue 1 avec au moins 50 % de pressings victorieux, dont un sympathique 5 sur 8 face à Lorient. C’est contre Nice, en février, en tant que latéral, qu’il a établi son record de pressings gagnants avec 11 (sur 30). Ce match contre les Aiglons est d’ailleurs la seconde performance collective du PSG en termes de pressings tentés (205, derrière les 210 face à Lyon).

Ils ne sont que cinq Parisiens à avoir réussi plus de pressings sur un match que Kehrer : Di Maria (14), Verratti et Rafinha (13), Gueye et Herrera (12).

Hormis le pressing, deux autres « datas » témoignent de son engagement : les tacles et les duels. Ces deux catégories montrent bien toute l’ambivalence de la saison de l’ancien de Schalke : alors que ses stats de duels disputés et de tacles effectués témoignent de sa bonne volonté et de son souci de bien faire, ses taux de réussite dans ces domaines mettent en lumière toutes ses limites.

En effet, avec 2.6 tacles tentés par 90 minutes, il affiche le plus haut niveau des défenseurs centraux. Mais son taux de réussite (66 %) le situe lui au dernier rang…

Les constats sont exactement les mêmes pour les duels : ses 7.7 duels en font le central le plus souvent à la lutte, mais, malheureusement, il perd près d’un duel sur deux et se trouve donc nettement en retrait dans la hiérarchie des joueurs de son poste.

Ces deux points faibles seront davantage développés dans la partie suivante.

On a moins aimé

Qu’il se fasse déborder aussi facilement

Réputé fort dans le duel, il n’a jamais vraiment été à la hauteur des attentes dont il était l’objet, surtout dans ce secteur précisément. Cette année encore, on vient de le voir, ses stats de duels et de tacles sont clairement inférieures à celles de ses coéquipiers de la défense centrale.

Avec un peu plus d’un duel sur deux remporté (53 %), il est plus proche des taux des milieux de terrain comme Paredes ou Gueye (en vert sur le graphique), mais loin de Kimpembe, Marquinhos et Diallo (en jaune).

Même si ce sont notamment les duels disputés en tant que latéral qui le pénalisent (49 %), son taux de succès en tant que défenseur central reste insuffisant (55%). Car pour un match à la copie ultra-propre (7/7 face à Nîmes), combien de rencontres où il se fait majoritairement dominer ? Dans le désordre : 3/11 à Lens où Ganago a régulièrement pris le dessus ; 2/6 face à Strasbourg et notamment Bellegarde fin 2020, ou encore 3/10 face au St Etienne de Bouanga en fin de saison. En tant que latéral ce ne fut guère mieux avec une mention spéciale pour son entrée catastrophique face à Nantes (1 duel gagné sur 5).

Même dans le jeu aérien, censé être son point fort, il se fait dominer par les autres centraux de l’équipe (sauf Kimpembe, de peu) :

C’est néanmoins mieux que la saison dernière où il n’avait gagné que 44 % des duels aériens disputés en Ligue 1.

On l’a vu précédemment, ses stats de tacles sont également moins bonnes que les autres centraux.  Alors qu’il utilise bien plus que les autres cette arme du tacle, il est le central avec le moins bon taux de réussite dans cet exercice (66 % contre 77 % de moyenne pour les 3 autres). Son taux est d’ailleurs moins bon comme central (65 %) que comme latéral (67 %).

Après une première saison avec le PSG à 73 % de réussite, il ne cesse décliner depuis.

Ses stats de réussite aux tacles en Ligue 1 sont elles-mêmes clairement en retrait par rapport à celles qu’il produisait en Bundesliga.

Les difficultés de l’Allemand dans les « un contre un » se voient aussi à travers ses fautes commises :

Avec 1.5 fautes par 90 minutes, il se distingue nettement des autres défenseurs centraux de l’équipe. Ce sont très rarement des grosses fautes et jamais plus de trois au cours d’un match, mais ces fautes à répétition sont bien le symptôme d’un joueur en difficulté, en retard ou tout simplement maladroit. Cela lui a valu trois cartons jaunes en Ligue 1.

Ses passages en tant que latéral faussent néanmoins un peu la comparaison avec les autres centraux. L’écart de fautes commises entre les deux postes est en effet assez important : 1.2 en tant que central (ce qui le situe au même niveau que Kimpembe) et 2.1 en tant que latéral (ce qui le positionne très haut, presque au niveau de Kurzawa).

Hormis lors de sa première saison avec Schalke 04 (2016-2017), jamais il n’avait commis autant de fautes.

Sa régression sur le plan technique

Ce qui choque à la lecture des stats de passes de Kehrer, ce n’est pas tant leur niveau par rapport aux autres défenseurs centraux, que leur évolution sur trois saisons. Toutes ses données sont orientées à la baisse.

Son pourcentage de passes réussies reste par exemple excellent (92.5 %), mais c’est son plus bas niveau depuis son arrivée en 2018. La régression est plus flagrante encore sur le taux de passes longues réussies :

Non seulement il tente moins de passes longues cette saison, mais, en outre, son taux de réussite a considérablement fléchi. Ils ne sont que cinq dans tout l’effectif à avoir un moins bon taux de réussite que le sien. Son jeu long ne représente en outre que 3 % de ses passes totales. Il s’agit, là aussi, d’un des taux les plus faibles de l’effectif du PSG, et le plus bas parmi les défenseurs centraux.

Avec 8 passes longues ratées au cours d’un même match (à St Etienne, pour les débuts de Pochettino), il a même réalisé la pire performance individuelle de la saison pour un Parisien (2 sur 10 en tout).

Cette réticence à jouer long peut être vue comme un déficit de confiance qui anime l’Allemand, en particulier, évidemment, depuis sa fameuse bourde face à Man U en mars 2019. Son faible taux de passes vers l’avant constitue un autre signe qui va dans le même sens :

Avec 31.4 % de passes vers l’avant, il a le plus faible ratio des défenseurs centraux parisiens. Cette frilosité est confirmée par ses faibles niveaux de passes réussies vers le dernier tiers et de passes progressives.

Ses taux sont assez nettement inférieurs à Diallo et Kimpembe, sans parler de Marquinhos bien sûr. Il réussissait pourtant jusque-là entre 3.6 (2019-2020) et 3.8 (2018-2019) passes vers le dernier tiers. 11 des 44 passes vers le dernier tiers qu’il a réussies l’ont d’ailleurs été à l’occasion du dernier match qu’il a joué pour son compatriote Tuchel (face à Strasbourg, en tant que défenseur central).

Autre indicateur des difficultés techniques rencontrées par Kehrer cette saison, ses ballons perdus. Ils représentent 8.1 % des ballons qu’il a joués cette saison en Ligue 1.

Que l’on analyse ses données en valeurs ramenées à 90 minutes ou en pourcentage des ballons joués, ses stats de ballons perdus sont à leur sommet cette saison. Lille est un peu sa bête noire puisqu’en deux matches contre les Dogues, il a perdu 22 ballons en tout, en ayant joué 154 minutes. Cela représente 15 % des ballons qu’il a joués contre l’équipe de Galtier.

Logiquement, c’est surtout en tant qu’arrière droit qu’il a perdu le plus de ballons : 15 % des ballons qu’il y a joués (contre 6 % en tant que central). Ce taux de 15 % le situe légèrement au-dessus de Bakker et Dagba mais en-dessous de Kurzawa et Florenzi.

Autre signe des lacunes techniques de Kehrer : il n’a cadré aucun tir cette saison en Ligue 1. Sa tête sur la transversale face à Nîmes est comptabilisée comme non cadrée. Il est le seul, avec Diallo, parmi les joueurs avec au moins 200 minutes jouées, à n’avoir aucun tir cadré à son actif cette saison en Ligue 1.

En cumulé lors des deux saisons précédentes avec Paris, il avait cadré 7 de ses 17 tirs, soit 41 %. En Bundesliga, il avait cadré 11 tirs sur 30, soit 37 %.

Enfin, on ne pouvait pas conclure ce chapitre sur les limites techniques de Kehrer sans parler de ses centres. En 1 610 minutes en Ligue 1 cette saison, dont un peu moins de la moitié en tant que latéral, il a réussi… 2 centres ! C’est autant que Gueye et Verratti pour donner un ordre d’idée.

Son taux de réussite dans l’exercice (20 %) est, là aussi, son plus mauvais depuis son transfert dans la capitale.

En trois saison à Paris, il aura donc réussi 5 centres (aucun en Champions League).

Bilan : 4/10

Après une saison 2019-2020 quasi-blanche, on ne savait pas trop à quoi s’attendre avec Thilo Kehrer. Allait-on retrouver le Thilo tranchant dans ses interventions, dur sur l’homme mais sûr de sa force, capable d’aller glaner une place de latéral droit titulaire au sein de la Mannschaft ? Ou le joueur pataud, fébrile, semblant tétanisé à l’idée de recevoir le ballon ou de disputer un duel qu’il était devenu après sa bourde à Old Trafford ?

Malheureusement, la version 2020-2021 de Kehrer penche plutôt du mauvais côté. Si l’on en est arrivé à se réjouir qu’il ne commette plus de grosses erreurs, c’est qu’on a terriblement réduit nos attentes par rapport à ce joueur. Et ce n’est pas bon signe, ni digne des ambitions de ce PSG-là. Il n’y a probablement plus qu’à espérer que ses matches corrects de fin de saison aient permis de remonter sa côte en Allemagne ou en Angleterre, parce que, même avec toute la meilleure volonté du monde, il semble trop juste pour Paris.

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