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Analyses Saison 2020-2021

Pablo Sarabia, le pied tendre

Nous poursuivons notre série des bilans individuels 2020-2021 des attaquants parisiens avec Pablo Sarabia. Après une bonne première saison sous ses nouvelles couleurs, l‘Espagnol n’a pas confirmé et a reculé dans la hiérarchie des joueurs à vocation offensive. Pourtant, comme l’a également démontré son Euro avec sa sélection nationale, il a du talent. Analyse en chiffres et en graphiques d’un joueur un peu tendre pour le PSG.

On a aiméOn a moins aimé
Ses 7 buts et sa « Masterclass » aux CostièresSon recul dans la hiérarchie suite au changement de coach
Ses efforts défensifsSes limites physiques, techniques et mentales
Son Euro 2021

On a aimé

Ses 7 buts et sa « Masterclass » aux Costières

Quatrième buteur du club toutes compétitions confondues en 2019-2020 (14 buts), Pablo Sarabia ne recule finalement que d’un cran cette saison (5ème). Souvent critiqué, il a su, sans faire de bruit, enquiller 7 buts, dont 6 en Ligue 1.

Parfois comparé à Draxler et en concurrence avec lui, il fait mieux que l’Allemand qui n’a scoré que 4 fois.

En outre, ses buts ont le bon goût d’être le plus souvent un plaisir des yeux. En commençant par la fin de saison, cela donne :

  • Un magnifique contrôle orienté pour éliminer un défenseur strasbourgeois suite à une montée de Danilo. Il enchaîne avec une très belle frappe du droit qui trompe Sels
  • Un bon appel dans la surface bordelaise afin de se rendre disponible pour un centre de Gueye. S’en suit un magnifique enchaînement contrôle pied droit frappe pied gauche sur laquelle Costil est battu. Ce sera l’unique but de la rencontre
  • Encore un très bon appel dans la largeur contre Nîmes pour reprendre de la têt un centre de Di Maria
  • Une très belle frappe du gauche contre Brest suite à une astucieuse talonnade d’Icardi. Ce sera un des neuf buts parisiens de la saison de Ligue 1 de l’extérieur de la surface.
  • Un splendide piqué « di Mariesque » à Nantes suite à une offrande d’un défenseur nantais

Et on a gardé le meilleur pour la fin. A Nîmes, en début de saison (7ème journée), dans un match gagné facilement (4-0) face à des Nîmois très vite réduits à dix, il ne s’était pas contenté de marquer mais avait été tout simplement étincelant.

Le festival Sarabia avait commencé à la 30ème minute avec un magnifique centre déposé sur la tête d’Herrera sauvé in extremis par Reynet. 

Mais c’est en deuxième partie de deuxième mi-temps que Sarabia va faire le show : il délivre tout d’abord une passe décisive à Florenzi qui n’a plus qu’à pousser le ballon dans le but suite à une bonne tête de l’Espagnol sur un centre de Dagba (78ème minute).

Cinq minutes plus tard, il signe sa seconde passe décisive de la soirée en lançant Mbappé dans la profondeur afin que celui-ci trompe Reynet :

Il parachève son match de l’année avec un but du gauche sur une frappe tendue que le gardien nîmois, masqué (on comprend mieux en voyant la capture d’écran ci-dessous), prend entre les jambes.

Si l’on récapitule, la feuille de stats de Sarabia à Nîmes est la suivante :

  • 1 but
  • 2 passes décisives
  • 7 passes clés : il n’y a que Neymar qui fera mieux sur un match cette saison
  • 6 tirs dont 3 de la tête (record de la saison pour un Parisien)
  • 84 ballons joués (son record de la saison) dont 14 dans la surface (plus haut score d’un Parisien hors duo Mbappé-Neymar cette saison)
  • 2 centres réussis
  • 3 passes longues sur 4

N’en jetez plus ! Ah si, une dernière : il est le seul joueur du PSG cette saison à avoir réussi un but et deux passes décisives au cours d’une rencontre. Il s’agit tout simplement d’une des meilleures performances individuelles de la saison côté PSG.

Ses efforts défensifs

C’est la dure loi au PSG : plus on est doués et performants offensivement, moins on fait d’efforts défensifs. Et vice versa… Ce qui, dans le cas de Pablo Sarabia, signifie qu’il fait beaucoup d’efforts défensifs. C’est même lui qui en réalise le plus.

Si l’on additionne les tacles tentés, dégagements, interceptions et tirs contrés, il réalise 3.9 interventions défensives par 90 minutes. La moyenne de ses coéquipiers de l’attaque est de 2.5. C’est notamment lui qui effectue le plus de tacles (2.9).

Il a par exemple réalisé 6 tacles face à St Etienne (3 réussis), mais aussi 3 interceptions à Monaco.

D’autres indicateurs traduisent bien son investissement défensif :

Les données de pressing mettent en effet en évidence sa volonté de s’arracher et de défendre en avançant : avec 15.3 pressions par 90 minutes, il est le second du secteur offensif parisien derrière Di Maria. Il est même 6ème de tout l’effectif parisien. Son taux de succès dans cette entreprise n’est pas extraordinaire (28 %) mais les intentions sont louables.

Son Euro 2021

Pendant l’Euro disputé cet été, tous les supporters parisiens avaient évidemment à l’œil les prestations des Bleus et de Mbappé et Kimpembe en particulier. Mais aussi, et pour des raisons bien différentes selon les cas, des joueurs étrangers actuels ou à venir du PSG : Verratti, Donnarumma, Wijnaldum et Sarabia.

Concernant l’Espagnol, rien que le fait qu’il ait été sélectionné pour ce championnat d’Europe avait surpris les supporters parisiens, tant sa saison n’avait pas enthousiasmé les foules. Ça en dit d’ailleurs long au passage sur le décalage de regard sur le niveau de Sarabia : joueur de bout du banc selon les fans parisiens, international chez l’une des meilleures équipes d’Europe vu de l’autre côté des Pyrénées.

Et le moins que l’on puisse dire c’est que ses prestations à l’Euro risquent de faire augmenter encore plus l’incompréhension.

Remplaçant lors du triste nul inaugural de la formation de Luis Enrique face à la Suède, il fait son apparition à la 66ème minute à la place de Morata. Il faut dire qu’il avait été très bon lors de la préparation, notamment face au Portugal.

Face au bloc très bas de la Suède, l’ailier du PSG a apporté de la verticalité dans la possession stérile espagnole. En quelques minutes, le Parisien est même parvenu à amener le danger dans la surface adverse par ses provocations et ses centres, l’un d’entre eux débouchant sur leur meilleure occasion.

Fort de cette bonne entrée, Luis Enrique renouvelle l’expérience lors du match suivant face à la Pologne, mais avec moins situations favorables créées par Sarabia.

Néanmoins, dans le match décisif face à la Slovaquie pour se qualifier pour les 1/8èmes de finale, le coach espagnol le titularise pour la première fois et Sarabia ne va pas laisser passer sa chance. Il est l’auteur du geste qui va débloquer le match face aux Slovaques et lancer véritablement les Espagnols dans la compétition : à la 30ème minute, sa grosse frappe aux 18 mètres heurte la barre mais le gardien Dubravka se troue complètement en voulant dégager le ballon et le catapulte dans son propre but.

Mis en confiance par ce but, l’ancien Sévillan va enchaîner les actions décisives : il est l’auteur du troisième but de la Roja en reprenant un centre d’Alba, puis passeur onze minutes plus tard pour le très beau but de Ferran Torres.

De nouveau logiquement titulaire en 1/8ème face à la Croatie, il va poursuivre sur sa lancée en étant encore très bon et en inscrivant de nouveau un but (le premier des cinq buts espagnols de la partie remportée 5-3, et son 3ème en 9 sélections).

Une blessure à la jambe va malheureusement le couper dans son élan lors du ¼ de finale face à la Suisse (il sort à la pause après une mi-temps où, gêné physiquement, il n’a pu s’exprimer) et le priver de la demi-finale face à son coéquipier de club Marco Verratti.

Néanmoins, il a livré un excellent Euro où il est passé d’un statut de joker à celui de force offensive numéro un. Son bilan statistique est excellent :

  • 2 buts
  • 1 passe décisive
  • 0.5 expected assist par 90 minutes, soit le 3ème total de tous les joueurs de l’Euro
  • 0.9 expected assist + expected goal/90 min, 7ème joueur de l’Euro
  • Un différentiel de +2.5 buts par 90 minutes pour son équipe en sa présence sur le terrain, soit le second ratio de tout l’Euro (derrière le Belge Boyata)

Autant dire que son excellente prestation n’a pas laissé insensibles les médias espagnols, mais aussi les supporters parisiens, partagés entre la surprise de voir ce joueur timide en Rouge et Bleu prendre autant d’initiatives avec la Roja, et la satisfaction de se dire que cela risque d’attirer des recruteurs potentiels qui ne se bousculaient probablement pas au portillon après ses deux saisons un peu timorées à Paris.

Alors, comment évaluer cet Euro de Sarabia ? Et quel est son véritable niveau ? Comment un joueur qui apparaît parfois si limité avec son club peut se transformer en leader d’attaque d’un demi-finaliste de championnat d’Europe ?

Il y a bien sûr de nombreux exemples de joueurs capables de se transcender pour leur pays ou juste l’espace d’une compétition internationale. Pour Sarabia, l’appréciation de son réel niveau est rendue encore plus floue par ses excellentes saisons en Liga. Il faut en effet rappeler qu’à son arrivée dans la capitale française, il était présenté comme une excellente recrue et les 18 M€ de sa clause de transfert paraissaient ridicules compte tenu de la qualité du bonhomme.

Ses stats de buts (23) et passes dé (17) lors de sa dernière saison avec Séville étaient en effet impressionnantes :

Ceci paraît désormais bien loin mais permet de commencer à évoquer les aspects psychologiques d’un homme qui est peut-être plus confortable dans un environnement qui lui est familier. Au PSG, au milieu de toutes ces stars, il ne se sent peut-être tout simplement pas à l’aise et n’ose pas montrer ce qu’il sait faire.

Quoi qu’il en soit, les fans parisiens, qui pour la plupart ne croient pas vraiment à une renaissance de Sarabia, voient forcément d’un très bon œil cette mise en lumière d’un joueur qui, à la manière d’un Draxler, était plutôt perçu comme un « invendable ». Pour info, selon Transfermarkt.fr, il est sous contrat avec le PSG jusqu’en juin 2024 et sa valeur marchande est estimée à 24 M€.  

On a moins aimé

Son recul dans la hiérarchie suite au changement de coach

Qui dit changement de coach, dit cartes rebattues et hiérarchie modifiée. Pour Pablo Sarabia, l’arrivée de Pochettino au début de l’année 2021 a clairement eu un impact défavorable sur son temps de jeu.

En Ligue 1, il est passé d’un statut de premier suppléant en attaque dès qu’une place se libérait, à dernière roue du carrosse. C’est encore pire en Champions League où, même en étant rarement titulaire, il était régulièrement utilisé par Tuchel, alors que Pochettino l’a complètement snobé (0 minute).

Il est ainsi passé (Ligue 1 et Champions League confondues) de 38 % des minutes disponibles jouées en 2020 à 27 % en 2021.

Si l’on est honnête, on constate que la baisse du temps de jeu de l’Espagnol ne date pas du changement de coach. Comme le révèle le graphique ci-dessous, il avait déjà enregistré une baisse de ses minutes jouées entre la saison 2019-2020 et la première partie de 2020-2021, pourtant disputées avec le même coach.

En Ligue 1, par exemple, il était passé de 48 % des minutes jouables en 2019-2020 à 42 % sur la première moitié de la saison suivante.

Au global, il est quand même passé de 46 % du temps de jeu possible en 2019-2020 à seulement 27 % avec Pochettino sur l’année civile 2021.

Sur l’ensemble de la saison de Ligue 1, il a disputé 27 matches, mais seulement 13 comme titulaire. Cela fait de lui le joueur le plus souvent utilisé en sortie de banc (14 fois) :

Il n’a disputé que huit matches en intégralité sur les 31 disputés, dont aucun en Ligue des Champions.

Sa moyenne de minutes par match est donc extrêmement basse (49 en Ligue 1).

Si l’on met de côté les jeunes du centre de formation et Jesé, seul Draxler a une moyenne de minutes/match encore plus faible que Sarabia. La saison précédente, en Ligue 1, l’Espagnol disputait en moyenne 55 minutes des matches joués.

Ses limites physiques, techniques et mentales

On est sûrement un peu sévère mais plusieurs datas, confirmant celles de la saison précédente, vont dans le sens de limites qui seraient à la fois physiques, techniques et mentales.

Commençons par ses aptitudes physiques. C’est évidemment réducteur mais les stats de duels montrent bien qu’on n’a pas affaire à un expert en castagne. Pire, il semble fuir le contact.

Comme la saison dernière au moment du bilan, le constat d’un manque d’impact de Sarabia dans les duels est évident. L’ancien Sévillan est, avec Kean, le joueur qui gagne le moins souvent ses duels en Ligue 1. Sur le graphique ci-dessous, il est tout en bas à gauche. Cela signifie qu’il dispute peu de duels et en perd l’immense majorité :

En chiffres cela donne 2.9 duels gagnés par 90 minutes (sur 7.8), soit 37 % de succès.

C’est à Marseille en février qu’il a établi son record de duels joués sur un match, mais cette rencontre témoigne bien de ses difficultés à gagner ces batailles : 2 duels remportés seulement sur les 13 disputés.

On passera rapidement sur les duels aériens (0.3 gagnés par 90 minutes, à 27 %, seuls Dagba et Mbappé font moins bien) pour s’intéresser aux tacles. Avec 35 % de tacles réussis, l’Espagnol est le plus mauvais du PSG dans cet exercice après Neymar.

Autre donnée illustrant son faible moteur : le nombre de ballons joués. Avec 55 par 90 minutes, il est dans le trio de queue de classement, devant Icardi et Kean que leur poste n’invite pas forcément à multiplier les touches de balle.

Il en touchait 10 de plus la saison précédente et il n’a dépassé les 70 ballons joués dans une rencontre qu’à une seule reprise (à Nîmes).

Un faible volume de jeu, des duels perdus, notamment aériens, des tacles inefficaces : Sarabia, 1.74 m et 70 kilos, paye en partie son gabarit frêle et son manque de grinta (curieux pour un Ibérique…).

Le problème, c’est que le diagnostic ne se limite pas aux limites physiques. Techniquement aussi, l’ancien Sévillan a encore montré ses lacunes. On s’en rend notamment compte avec ses stats de dribbles : avec 0.5 dribble réussi par 90 minutes, il est dans les mêmes eaux que Dagba et Herrera, et bien sûr très loin des autres joueurs offensifs du PSG. La moyenne hors Sarabia des attaquants du PSG est de 2.3 dribbles réussis.

Surtout, son taux de réussite est le plus bas de tout l’effectif. En Ligue 1, il a en tout et pour tout réussi 8 dribbles (sur 22) en 2020-2021. En deux saisons avec le PSG (Ligue 1 et Champions League), il aura réussi 15 dribbles en 61 matches.

Même s’il n’affichait pas des stats « neymaresques », il osait plus tenter sa chance individuellement quand il était en Espagne :

Avec Séville, il tentait en moyenne 2 dribbles par 90 minutes, à 45 % de réussite. Même s’il y a du mieux cette saison puisqu’il a pratiquement doublé sa moyenne par rapport à 2019-2020, on est très loin du compte.

C’est encore pire en Champions League puisqu’il n’a tout simplement réussi aucun dribble, en deux tentatives.

Ses stats de ballons perdus ne viennent pas inverser le diagnostic : il perd 15 ballons/90 minutes, ce qui le situe au 4ème rang de tout l’effectif. Cela représente 27 % des ballons touchés. Compte tenu de la faible prise de risque balle au pied, cela fait vraiment beaucoup.

On en terminera sur les lacunes techniques avec son pourcentage de passes réussies (79.7 %) qui le situe clairement en queue de peloton au PSG et qui est en outre en baisse par rapport à 2019-2020 (82.7 %)

En plus de ces limites physiques et techniques, il y a clairement un blocage psychologique qui le freine dans ses tentatives individuelles. On le voit bien dans son refus de provoquer l’adversaire balle au pied. Il semble avoir peur de mal faire dans un domaine où les stars parisiennes excellent.

Même remarque pour les chevauchées balle au pied : avec 122 mètres gagnés par 90 minutes, il est dans les 5 derniers de tout l’effectif parisien.

Et ce n’est guère mieux pour les mètres gagnés par la passe : ils ne sont que trois à faire moins avancer le jeu parisien que lui, mais il s’agit de trois avants-centres forcément moins enclins à faire gonfler ce type de stats.

Cette stat illustre bien elle aussi son manque de prise de risques. Il semble vivre avec la peur de perdre un ballon et qu’on le lui reproche ensuite. Pour preuve encore, il est l’attaquant qui tire le moins souvent au but après Draxler.

Bref, il n’a pas réussi à passer ce cap mental qui le contraint à jouer avec le frein à main. Pour sa première saison, ce type d’inhibition pouvait se comprendre. Mais, à part dans les centres (il est passé de 10 % de réussite à 29%), on ne constate pas de progression dans la prise d’initiatives.

Bilan : 5/10

Trop neutre. Un peu tendre. Ce sont les expressions que l’on utiliserait si l’on devait résumer la saison de Pablo Sarabia avec le PSG en quelques mots. Dans un secteur offensif qui brille de mille feux quand les titulaires sont alignés, le recul est trop important quand l’Espagnol doit assurer la relève.

Le pire c’est que l’on sait qu’il a les capacités pour s’imposer au PSG : il était un des meilleurs joueurs de Liga quand il a quitté Séville, sa première saison à Paris était plutôt bonne, et on a encore vu à l’Euro qu’il était pétri de talent.

Mais le blocage semble psychologique. Et le changement de coach ne lui a pas permis de redresser la barre (au contraire) puisqu’il s’est même fait dépasser par Draxler dans la hiérarchie des joueurs offensifs.

Puisque sa côte est remontée suite à son bon Euro et que le PSG a besoin de vendre, un départ au mercato estival semble le plus probable. Et l’on est prêt à parier que, si son nouvel environnement lui convient, il va de nouveau affoler les compteurs de buts et passes décisives.  

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